i think you may have some informations → Tobias

Priam est resté à Oxford pour une énième journée passée dans le Casino Hastings-Bass. Plus le temps passe, moins nous avons le droit d'y passer du temps. La nature reprend ses droits petit à petit, et le chef de notre département à Londres commence sérieusement à s'interroger sur la possibilité de mettre l'affaire de côté pour l'instant. Il faut croire qu'embêter les Hastings-Bass n'est pas exactement un sport apprécié par les autorités locales. J'essaye de me figurer quel pourcentage de méchanceté peut habiter un homme qui semble, à première vue, n'être qu'un peu fou, mais j'échoue de manière systématique. Je suis partagé entre l'envie de penser que cet homme ne fait rien d'autre que tenir un Casino et celle de me dire que des secrets bien trop sombres encadrent son histoire pour qu'il ne soit que cet homme simple qu'il prétend être. Bart Hastings-Bass a longtemps été marié - divorcé, remarié, redivorcé puis remarié - à l'actrice Trish Hastings-Bass, mère de ses enfants, dont les circonstances de la mort à en croire le dossier de la police, restent un peu trop floues pour être claires. Elle est morte dans sa chambre d'hôpital, soignée pour un cancer qui ne guérissait pas, mais rien ne justifiait totalement le fait qu'elle s'éteigne ce soir-là. Je ferme les yeux un instant puis quitte ma voiture, retirant mes lunettes pour les fourrer dans la boîte à gants. Il fait doux, assez pour laisser penser aux gens que l'été justifie la sortie des petites robes légères et autres accessoires inédits. Je me rends au Starbucks en face, non pas pour une simple incursion du côté de la caféine, mais pour rencontrer un type dont le nom m'a été donné par Priam, possiblement au courant d'affaires frauduleuses dans lesquelles Hastings-Bass aurait eu à loisir de tremper. Je pousse la porte, paye un café, et cherche mon possible futur indic des yeux. Un homme seul est installé plus loin et il me semble que c'est lui ; je m'approche, à pas mesurés, retirant ma veste et m'éclaircissant la voix quand j'arrive à sa hauteur. « M. Taylor-Roberts ? » Je lui tends ma main avant de me laisser tomber en face de lui. « Inspecteur Irons, merci d'être venu ». J'évite de lui montrer ma plaque pour ne pas attirer l'attention sur nous, il me semble inutile de nous faire de la mauvaise pub, à lui comme à moi. « Et bien j'imagine que je n'avais pas trop le choix.. Même si je ne sais pas vraiment ce qui m'amène ici. » Il parait mal à l'aise, comme bien des gens à sa place et face à une personne représentant les forces de l'ordre. Je ne peux que comprendre, j'imagine, ce qu'il ressent, et je serai sans doute à sa place dans de telles circonstances. C'est une des bases de la psychologie criminelle, tout le monde se sent coupable quand il doit répondre de ses actes devant l'autorité. La plupart des gens culpabilisent même de n'avoir rien fait. « Nous enquêtons, avec l'inspecteur Featherstone, sur le Casino Hastings-Bass, et tout me porte à croire que vous pourriez être en possession d'informations qui nous aideraient dans notre enquête.» Je hausse une épaule en essayant de sonner détaché et naturel. « Mais ça n'a rien à voir avec vous, soyez-en sûr.»

UC

Quand le téléphone avait sonné et qu'un inspecteur s'était présenté à l'autre bout du fil, Tobias fut pris d'une anxiété extrême, ses mains étaient devenues moites. Son rapport aux forces de l'ordre et à la justice sont assez exécrables et c'est plutôt compréhensible. Il avait sans cesse la peur au ventre de retourner derrière les barreaux. C'était un dénommé Irons qui voulait le rencontrer le lendemain, pour des raisons qui ne devaient être évoquées au téléphone, mais bien en face en face. Qu'avait-il bien pu faire pour attirer l'attention de la police ? Il savait qu'il était encore assez surveillé, on ne laisse pas un prisonnier sortir comme si rien n'était arrivé, surtout après dix ans. de détention. Il n'avait pas dormi de la nuit, s'imaginant les pires scénarii. Et puis, quand il se laissait enfin aller à se reposer, de vieux cauchemars resurgissaient.
Le lendemain, il essaya de se concentrer sur ses cours du matin mais il était distrait, incapable de retrouver ses moyens. Et puis arriva l'après-midi, où il était libre et pendant laquelle il aurait enfin les réponses à ses questions. Au moins, il n'irait pas au commissariat, cet endroit l'aurait encore plus angoissé. Là, il pourrait s'accrocher à son gobelet de café noir comme à une bouée pour le maintenir la tête hors de l'eau. Il était en avance, et après avoir commandé, il s'installa sur une petite table pour deux, dans un coin. D'habitude, il ne résistait jamais aux muffins de l'enseigne, mais il avait l'estomac bien trop noué pour avaler autre chose que de la caféine. Il guettait la porte d'entrée pour voir si quelqu'un essayait de le trouver, et vit passer quelques personnes, avant que quelqu'un ne s'approche finalement, alors qu'il commençait enfin à évacuer le stress qui le paralysait. « M. Taylor-Roberts ? » Il hocha la tête. Crispé, il lui tendit la main et la serra sans trop de force. Pour se donner un peu de contenance alors que le policier s'installait en face de lui, il porta son gobelet à ses lèvres et avala une gorgée qui lui brula légèrement la gorge. « Inspecteur Irons, merci d'être venu. » « Et bien j'imagine que je n'avais pas trop le choix.. Même si je ne sais pas vraiment ce qui m'amène ici. »

UC