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 i hate to turn up out of the blue uninvited. (lauréandre)

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MessageSujet: i hate to turn up out of the blue uninvited. (lauréandre)   i hate to turn up out of the blue uninvited. (lauréandre) Icon_minitimeDim 16 Juil - 19:58

Ce n'est sans doute pas raisonnable. Absolument pas. Pourtant, me voici, debout devant la maison qui sert de lieu de travail à mon ex-fiancé. Je regarde la façade de la bâtisse victorienne, en me mordant la lèvre. Elle est toujours aussi belle, impressionnante. Mais elle me paraît pour la première fois hautaine. Comme si elle me prenait de haut. L'air de me dire, avec dédain : « Tu n'es plus à ta place ici. Va-t-en, on ne veut plus de toi. »

C'est à se demander ce qui m'a pris. Une heure de bus et de métro. Trois changements. J'aurais pu me défiler - j'en ai eu l'occasion - mais je ne l'ai pas fait. Parce que même si ma venue ici n'est pas de bon sens, il y a bien eu un raisonnement derrière, une réflexion. J'ai besoin de le voir, de lui parler, to get closure. Je suis de retour à Londres depuis le mois de mars, et on ne s'est toujours pas croisés. Je pensais que ça arriverait rapidement, d'une façon ou d'une autre. Chaque jour, je m'attends à le croiser, qu'importe où je vais. Mais ce n'est jamais arrivé, jusque là. Et j'en ai assez de cette attente, si pesante. Alors j'ai décidé de venir le voir, pour éliminer aussi l'élément de surprise. Ce qui est injuste pour lui, parce que lui n'est pas prévenu de ma visite. Je m'invite à son travail, l'air de rien. Comme il s'était désinvité de ma vie, il y a des années, sans la moindre notice.

J'inspire profondément, cœur battant de plus en plus fort, et avance jusqu'à la porte. Je sonne, attends. Une voix inconnue me salue à travers l'interphone. « Hi, hello. I'm here to see Léandre Von brezen. I'm... » J'hésite un instant, avant de reprendre, non sans une grimace :  « I'm an old friend of his. » Un peu plus que ça, même. Mais on a été amis à un moment, avant tout. Et la demoiselle n'en a certainement rien à faire. « Sure, madam. Can I have a name? He's quite busy at the moment. » Peut-être que c'est un signe, et qu'il faut que je m'en aille ? Je me mords l'intérieur de la joue, en considérant mes deux options. Non, mais, je ne crois pas aux signes, ce sont des foutaises. Et je n'ai pas fait tout ce chemin pour rétropédaler. Assez de la menace constante de tomber nez à nez avec lui dans la rue. I need to get this over with. « Hello? Madam, you're still here? » me relance la jeune femme. « Hi, yes, sorry. Please tell him it's Laureline Faure. » « Will do. Would you mind holding for a minute, please? » Un peu malpolie de me laisser attendre devant la porte, mais d'accord. « Sure. » Voilà. Au moins, il sait. Et s'il dit non, et bien, tant pis. Je garderai ce que j'ai sur le cœur pour moi. Jusqu'à ce qu'on se croise par hasard dans la capitale. En espérant que je ne sois pas avec mon petit ami à ce moment-là, sinon ça risque d'être encore plus gênant comme moment. Ou sinon j'irai le voir chez lui. Peut-être pas ce soir, j'ai trop d'égo pour enchaîner aussitôt après un refus, mais une autre fois. « Madam, j'entends un buzz, et la porte d'entrée se met à vibrer, please come in. He'll meet you in his office. Across the hall, to your left. Have a good one! » Je souris, ironique. Je connais la maison depuis plus longtemps qu'elle. « Thank you. You, too. »

Je pousse la porte et retrouve l'intérieur de la demeure, si familier, si chaleureux. Je longe le couloir, remarque des changements, ici et là, mais reconnaît ma propre touche dans la décoration, toujours là. Des peintures, photos, échantillons de textile iconiques qui ont bien plus de signification pour Léandre et moi, que pour tout autre passionné de mode. Je suis submergée par une vague inattendue de souvenirs, mais je continue tout de même d'avancer. Inspire, expire, inspire, expire. Ça va aller. En y réfléchissant, ça aurait été plus facile de le revoir dans un endroit beaucoup plus neutre, moins associé à ce qu'on était. Mais c'est trop tard maintenant.

J'arrive devant la porte et frappe. Trois petits coups qui s'excusent d'exister, de déranger, mais qui le font quand même. Un peu comme moi, en cet instant. Ce qui ne me ressemble pas. But then again, it's been such a long time.
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MessageSujet: Re: i hate to turn up out of the blue uninvited. (lauréandre)   i hate to turn up out of the blue uninvited. (lauréandre) Icon_minitimeDim 16 Juil - 23:31

Le travail emplit ses journées, et le temps défile, de saisons en saisons, de collections en collections. Léandre regarde avec une détresse emplie de désespoir les croquis de cette fille qui vient de rejoindre leur équipe en se demandant s’il arrivera un jour à tirer quelque chose de son talent pourtant évident pour le dessin. Les bonnes idées, en revanche, les idées légères, les choses qui marchent, frappent, attirent l’œil… elle n’y est pas. Il n’est pas un patron méchant, il n’est même pas particulièrement exigeant, mais il a atteint un point de sa carrière ou, s’il ne s’entoure pas des bonnes personnes, il risque de ne plus jamais pouvoir progresser, atteindre un niveau encore meilleur, une renommée encore plus vaste. Comment annoncer à une jeune femme qu’elle est nulle ? Que ses dessins ne sont pas satisfaisant, qu’il faut recommencer, que ce milieu n’est pas de ce où l’on peut se tester des mois durant – il faut tout, tout de suite, anticiper les collections, anticiper les années, aussi, parfois. Les modes filent à vive allure, sont imprévisibles – une partie d’entre elles se créent ici même, entre les murs d’une maison londonienne, entre les murs de toutes les maisons de couture qui se disputent le marché du luxe. Léandre a appris à la dure, lui aussi, chez Westwood. Mais il n’est pas capable d’être aussi piquant que son ancienne patronne, et quelque part, il a sans doute tort – c’est comme ça que les gens apprennent.

La sonnerie de son téléphone le sort de ses pensées vaseuses, et il a presque l’impression d’avoir été pris sur le fait de vilaines critiques envers sa nouvelle recrue. La voix chantante de la standardiste – ou secrétaire, ou hôtesse d’accueil, il ne sait pas vraiment comment la nommer – le rassure un instant, et puis, soudain, comme sa bouche laisse échapper les mots qu’il ne s’attendait pas à entendre, le voilà qui pâlit. Sa main tremble autour du combiné, et l’espace de quelques secondes, il ne sait pas quoi dire. Il n’a entendu que quelques mots – son cerveau a arrêté d’écouter après le nom de famille. There’s a certain Laureline Faure. Laureline. Laureline. Son cerveau répète le prénom en boucle, comme un écho lointain, et voilà qu’une vague de souvenirs vient l’emporter différemment dans un autre monde, loin de cette maison, loin de ce coup de téléphone. Trop loin. Au fond de son estomac, une douleur sourde vient lui remémorer le vif et cruel sentiment de culpabilité ; il oublie presque qu’il est en ligne. « Let her in. And get us some tea », il ordonne finalement, en tentant de maîtriser le tremblement qui ponctuerait sans doute sa voix sinon – pour ne pas montrer son trouble. « And once she’s here, if anyone asks, tell them I’m not available », il précise, pour ne pas qu’ils soient dérangés. Léandre ne sait pas ce que Laureline vient faire ici. Il sait qu’elle est rentrée, bien sûr, il a en a discuté avec Tristan – c’est d’ailleurs la dernière chose dont ils ont parlé, avant de se disputer bêtement, ce qui a jeté un froid entre eux. Leur relation est souvent ponctuée de froids divers et variés, qui eux-mêmes sont souvent liés à Andrea. Léandre s’y résout, petit à petit, avec le temps.

Toujours est-il qu’il ne sait pas pourquoi elle est là, mais qu’il sait, sans trop avoir à réfléchir, qu’elle lui en veut sans doute beaucoup. Et le sentiment de culpabilité, souvenir des années passées, qui revient lui gonfler la poitrine, lui indique qu’il a eu tort. Qu’il a causé une peine dont tout le monde aurait pu se passer, lui le premier. Il a réfléchi, pendant ces années, bien sûr – il a pensé à ce jour où elle rentrerait, ce jour où ils se retrouveraient. Aux mots qu’il lui dirait, aux explications qu’il tenterait de fournir – mais comment s’excuse-t-on d’avoir brisé un cœur ? Et de l’avoir fait pour rien ? Pour échapper à une réalité immuable, pour fuir des responsabilités dont il ne voulait plus ? La seule explication rationnelle, c’est qu’il n’a un temps plus eu le courage de tout supporter. Les morts, les départs, la pression. Et il était si malheureux qu’il ne lui semblait pas possible de construire quoi que ce soit de bon, ou de beau. Même avec Laureline, qu’il aimait pourtant d’un amour excessivement sincère, peut être un peut trop dévoué. Mais ces angoisses ne justifient pas le départ silencieux ; rien ne le justifie. Et s’il est, évidemment, prêt à l’admettre, il n’est pas certain que Laure soit prête à l’entendre, ni même que ces maigres explications lui suffisent – si tant est qu’il faille qu’ils s’expliquent. Ca non plus, il n’en sait rien. Il ne sait pas où elle en est, ce qu’elle devient. Peut être s’est-elle mariée, peut être même qu’elle a eu des enfants – toutes ces choses qui sont des questionnements normaux et rationnels ne lui reviennent par vague que maintenant, alors que déjà, on frappe à la porte de son bureau.

Léandre se redresse, voit passer toutes ces années de solitude et de regrets, sa tentative de rattraper les choses, lamentablement échouée, quelques jours trop tard. Ces rendez-vous manqués, ces années passées à tenter de faire tous les deuils qui se sont, petit à petit, imposés à lui. Le deuil de son père, le deuil de son mariage avorté, le deuil d’une Calliope instable, le deuil d’une période de sa vie, d’une facette de son caractère, aussi. Tout ce dont il était sûr ; tout ce qui faisait sa stabilité, tout est partie en fumée au fil du temps. La souffrance est passée, il s’est retrouvé aujourd’hui, dans le travail surtout, dans l’expression d’un talent naturel qui s’est refusé à le quitter. Les autres domaines de sa vie sont moins réjouissants, mais il a fini par se faire à l’idée que peut être, il n’était pas fait pour ça, pour l’amour, pour la famille. Peut être que même Calliope est plus douée que lui, avec son Noble Autrichien inconnu – même si Léandre attend le soir où elle va tenter d’aller chercher Tristan.

Il abandonne son bureau et pose sa main sur la poignée de la porte. Son rythme cardiaque s’emballe, et il ne sait pas si c’est l’angoisse ou l’adrénaline. Parce qu’au-delà de toutes ces réflexions, au-delà de la peur de l’affronter, d’entendre et d’admettre ses reproches et sa souffrance à elle -- parce que c’est bien là le plus difficile, prendre conscience de la violence de la souffrance qu’il lui a causé – au-delà de tous ces questionnements qui ne cessent de se répéter, il y a bien une chose dont Léandre est sûr, une chose immuable, qu’il sait comme une évidence qui chantonne dans un coin perdu de son cœur et de son cerveau, une rengaine entêtante qu’il aura bien du mal à garder pour lui.

« Hello Laure. I’m happy to see you ».

Oui. Alors qu’il ouvre la porte sur un visage à la fois familier et étranger, pour tourner la page, sans doute, sur des années de toute et d’interrogations, Léandre est content de voir Laureline. Pas parce que leurs retrouvailles seront simples, pas parce qu’elles résoudront tout, pas parce qu’il espère quoi que ce soit. Simplement parce que Laureline est Laureline, et que peu importe ce qu’est leur relation, il éprouve pour elle des choses qu’il ne ressentira jamais pour personne d’autre.

« Even if that’s quite unexpected. Please come in ? » il lui propose, la laissant entrer, refermant soigneusement la porte derrière elle. Il n’ajoute rien, ne sait pas quoi dire de plus, alors il se contente de l’observer, de la détailler, discrètement, presque pudique. Elle semble plus sereine, plus mature aussi, moins… Moins angoissée, peut être.
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MessageSujet: Re: i hate to turn up out of the blue uninvited. (lauréandre)   i hate to turn up out of the blue uninvited. (lauréandre) Icon_minitimeLun 17 Juil - 21:54

Je tente d'inspirer et expirer, calmement. Mais le stress, l'anticipation et l'impatience montent en moi. Mes mains sont de plus en plus moites, et je ne sais que faire à part attendre un Come on in qui n'arrive pas. Et puis je me souviens que c'est Léandre. Celui qui ne te laisse pas faire l'effort de pousser la porte, mais vient te l'ouvrir, pour t'éviter tout embêtement. Celui qui revient aussitôt d'un autre pays, dès que tu lui envoies un message composé d'un seul mot : Rentre. Celui vers qui il suffit de faire un seul pas pour qu'il en fasse neuf.

La poignée grince, je la regarde tourner et recule légèrement, par réflexe. De peur d'être trop proche, trop dans son espace personnel quand il ouvrira. Sait-on jamais. La porte s’entrebâille, et il apparaît, fidèle à lui-même, quoiqu'un peu changé par les années. Mais essentiellement, c'est lui, c'est Léandre. Plus mon Léandre, mais Léandre tout de même. Mon cœur bondit, malgré moi, heureux de le voir. Un sourire naît sur mes lèvres. Mon estomac se noue, se dénoue, s'affole. Dans ma tête, je revois ce visage, un temps radieux, dans mes moments les plus heureux d'une ancienne vie qui me paraît si lointaine. « Hello Laure. I’m happy to see you. » Sa voix ramène aussi avec elle un tourbillon de souvenirs, des bouts d'anciennes conversations. C'est violent, intense. Emplie d'une joyeuse nostalgie, pendant quelques instants, j'ai envie de lui dire que je suis aussi contente de le revoir. Soudain, la lumière s'éteint. Les souvenirs ternes, que j'ai longtemps enfoui, que j'évite même soigneusement, reprennent le dessus. Je me rappelle de l'absence, du vide, du mal-être qui ont suivi son départ. Et mon bref sourire se transforme aussitôt en une espèce de moue, qui peine à tout contenir. Un presque sourire - mais pas vraiment - qui essaie de paraître poli, cordial. « Hi. » Je réponds simplement, tout aussi courtoise que l'expression que j'affiche. « Even if that’s quite unexpected. Please come in ? » Il me laisse passer. « Thank you. » J'entre et regarde autour de moi. La pièce est presque inchangée. Un peu comme tout ici, en fait. Je repère le fauteuil où je me suis assoupie trop de fois, avant que Léandre ne vienne me recouvrir avec la couverture qu'il garde spécialement pour moi. Je refusais de me mettre au chaud à chaque fois, insistant que je n'allais pas m'endormir, que je lui tenais compagnie, et puis je m'endormais toujours, fatalement. Ce qui est normal, j'étais épuisée par mon voyage d'Oxford, mais je tenais toujours à maximiser notre temps ensemble, quitte à finir la soirée échouée sur le canapé de son bureau. Je retiens un soupir. Ce n'était vraiment pas raisonnable de revenir ici, aujourd'hui. Ni jamais, à vrai dire.

Je reste debout, dans ce lieu que je connais tant mais qui ne me connaît plus, sans savoir trop où me poser. Je ne peux décemment pas me mettre à mes aises, comme je faisais avant. Alors je reste plantée non loin de la chaise la plus proche du bureau, alors que Léandre regagne sa place. « Well. Life didn't seem to want us to meet again. I happened to disagree. So here I am. » Je change mon sac de main, glisse mes cheveux derrière mon oreille - un vieux réflexe - avant de rajouter, sans pouvoir m'en empêcher, sans vraiment chercher à le faire : « Although, when an old friend comes back in town, it's common courtesy to call them up first. But then again, saying goodbye is one of the most basic common courtesies. And we both know how that went. » Quitte à faire des reproches, autant les baser sur les bonnes manières. Incontestables qu'elles sont pour nous, l'un autant que l'autre.


Dernière édition par Laureline M. Faure le Lun 11 Sep - 23:41, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: i hate to turn up out of the blue uninvited. (lauréandre)   i hate to turn up out of the blue uninvited. (lauréandre) Icon_minitimeLun 17 Juil - 23:13

Les reproches ne tardent pas, et Léandre en est presque soulagé. Il n’est pas certain qu’il aurait été capable de jouer les ignares, de participer à une vague mascarade. Ils valent mieux que de prétendre que tout va bien et que rien ne s’est passé, et puis Léandre a gagné en maturité, avec les années, et même s’il se plait à penser de lui même qu’il a toujours été particulièrement responsable, force est de constater qu’il n’a pas fait les choses correctement avec Laureline. Pourtant, il aurait dû, parce qu’il le lui devait, parce qu’il le leur devait. Et qu’elle aurait sans doute accepté quelques semaines d’absence si elle avait été mise au courant, plutôt qu’abandonnée là sans un mot d’explication. Léandre pensait avoir tourné la page, mais il réalise en l’ayant sous les yeux qu’il n’en n’est rien, et que c’est sans doute elle qui a eu raison de venir le trouver ici, aujourd’hui. Pour des explications. Sans doute. Ils ne méritaient pas cette histoire laissée en suspens et qui l’empêche sans doute d’avancer, lui, aujourd’hui. Peut être que Laureline s’en sort mieux, et il l’espère de tout son cœur. Il espère ne pas être responsable d’un mal-être supplémentaire, d’une quête sans fin d’un homme mieux que lui, moins lâche. Il lui souhaite tout le bonheur qu’elle mérite, et c’est pour le mieux si elle a réussi à se remettre de leur relation, de l’absence de rupture, du départ brutal et non annoncé. Lui, il n’y est pas vraiment parvenu, mais c’est tant pis pour lui sans doute. Il accepte la sentence en baissant la tête, parce qu’il aurait pu se comporter autrement. Il aurait pu mieux se comporter, surtout.

La présence de Laureline dans son bureau lui rappelle toute une ribambelle de souvenirs qui sont à la fois doux et douloureux. Son visage endormi dans un coin de la pièce, ses croquis qui s’oubliaient parfois d’une robe d’hiver aux traits fins de son visage. Les discussions, les conseils, les décorations, toutes ces touches d’elle-même dispatchées un peu partout dans sa vie reviennent le hanter par vagues. Il repense à tout ce qu’il a gaspillé par inconscience et la culpabilité, de nouveau, lui agite les entrailles.

Plus encore, Léandre ne peut s’empêcher de remémorer cette première rencontre, programmée par leurs frères et sœurs respectifs. Un coup d’état, sans doute, quand l’époque était encore belle et facile. Quand Tristan et Calliope se tournaient autour. Un voyage à Paris, un regard sur le quai d’une gare. Ils n’avaient pas eu à arranger grand chose, finalement, car tout était venu de manière la plus naturelle qui soit, et il n’a pas fallu des années à Léandre pour comprendre qu’il avait trouvé la femme de sa vie, la vraie. Il n’en doute pas plus aujourd’hui qu’à l’époque. La seule différence, c’est que la femme de sa vie n’est désormais plus à lui.

Il accueille son commentaire sans broncher. Il a noté les émotions qui traversent son visage quand il ouvre, quand il parle. Il imagine aisément par quel genre de contradictions elle peut être traversée ; ce n’est pas si difficile. Et puis, il la connaît, tout de même. Elle a sans aucun doute énormément changé, mais certains traits ont le dos dur. Léandre s’installe dans son fauteuil et montre la chaise en face de la sienne. Impersonnelle, comme si elle était là pour un rendez-vous – et en même temps, la distance semble nécessaire, voire vitale. Pour mettre les choses à plat.

« Please sit ? », il murmure, parce que quelque chose lui dit qu’ils en ont pour un moment, qu’il n’a pas envie qu’elle reste là, plantée devant lui comme si elle ne reconnaissait ni les lieux ni leur propriétaire. Qu’ils parlent est indispensable mais Léandre ne pourrait pas supporter qu’ils agissent en parfait étranger, qu’elle lance tout ce qu’elle a à dire là, en face de lui, comme sur le départ, comme si elle n’allait pas écouter ce qu’il avait à dire lui aussi, même si ce sont de maigres excuses sans fond.

« You’re right, I’ve been extremely rude », confesse-t-il, une fois qu’elle est assise, en face de lui. Il s’empare d’un stylo avec lequel il joue un peu, signe évident de nervosité qu’il ne cherche même pas à dissimuler. « Twice », il complète, laissant lui échapper un soupir las qui n’est dirigé que contre lui-même. « I wasn’t so sure whether you wanted to be my friend or not after everything that’s happened », il lance, en haussant une épaule. « That’s why I didn’t call ; I regret that now, obviously, but it’s easy to regret something afterwards, right ? » il lance, question rhétorique qui n’appelle pas réellement de réponse, en réalité. Evidemment, c’est facile de regretter. Mais les regrets effacent rarement le mal qui a été causé en amont.

« I started having second thoughts and regrets as soon as I landed in Vienna, back then. It took me two days to decide that I had to come back to London, and two more days to find a plane. But I swear to God I was coming back here to apologise for everything. Unfortunately, you were already gone », il explique, sa gorge un peu serrée, les mots perdant en intensité au fur et à mesure qu’il s’explique. « I can’t explain what happened in my mind the day I decided to leave without a word. Even for me, it’s unbelievable, and so not like something I would do—God, I swear, if only you knew how much I regret it », il murmure, ses mains posées à plat devant lui. Ses yeux alternent entre le visage contrarié de Laure et Londres, dehors, sous le soleil de l’été. L’émotion est difficilement contrôlable, et il se trouve tellement idiot – idiot d’avoir pensé une seule seconde qu’il était passé à autre chose, et que tout ça était derrière lui. « I didn’t think I could take care of you anymore. I felt that I failed Callie and the times were so disturbed, it seemed… I don’t know. I don’t know anymore. I’m not even sure I once knew why I left, it just seemed like the only option, and I know it wasn’t now. I take full responsability for all of this. All that waste », ajoute-t-il, comme pour insister sur le fait qu’il ne lui adresse pas le moindre reproche. Parce que ce n’est pas le cas. Il n’est pas en colère, il ne lui en veut en rien. Il est juste triste, maintenant que la réalité lui revient en pleine face, maintenant que les souvenirs ne sont plus bloqués par son déni. Il aimerait revenir en arrière et effacer la souffrance.

« I’ll never forgive myself for what I’ve done to you », il conclut, pour l’instant, pour tenter de lui faire comprendre. Il hausse une épaule, remet le crayon en place dans son pot, et ses mains se joignent devant eux, comme un réflexe malhabile pour évacuer le stress de la conversation.
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MessageSujet: Re: i hate to turn up out of the blue uninvited. (lauréandre)   i hate to turn up out of the blue uninvited. (lauréandre) Icon_minitimeDim 23 Juil - 17:52

De derrière son bureau, l'air grave, il me propose de m'installer. Le siège réservé aux invités - même si je n'en suis pas réellement une, aux clients, aux inconnus, aussi. Ce qu'on est devenus, après tout ce temps. Même si, pas tout à fait. « Thank you », dis-je en prenant place. All in good manners. Je regarde son visage mais évite son regard. Je ne devrais pas, je n'ai rien à me reprocher. Mais je crains le trop-plein d'émotions. Être ici, face à lui, est déjà assez chargé en souvenirs et sentiments du passé, pas besoin d'en rajouter plus. I'll just say my piece et je m'en irai, marchant droit et tête haute, malgré la tornade qui me déchire intérieurement. C'est ça qu'ils ne vous disent pas sur les anciens amours : on a beau passer à autre chose, faire son deuil intérieur, penser avoir lâché tout ressentiment ; il suffit de revoir la personne pour que tout remonte à la surface, vous submerge. Le bon, comme le mauvais.

« You’re right, I’ve been extremely rude. » Mes yeux suivent les siens, jusqu'au stylo qu'il prend et qu'il commence à faire tourner nerveusement dans sa main. Il y a des choses qui ne changent jamais. « Twice. » C'est peu de le dire. J'acquiesce. « I wasn’t so sure whether you wanted to be my friend or not after everything that’s happened. » J'ai envie de rire jaune, mais aucun son ne sort de ma bouche. Je ne sais pas d'où il tient cette idée, mais je ne suis absolument pas le genre de personne à croire en la possible amitié entre les ex. Comment retrouver un lien platonique avec quelqu'un qu'on a tant aimé, pour qui on était prêt à revoir sa vision des choses, sans qu'elle ne l'ait demandé. Comment avoir une distance, soit-elle physique ou émotionnelle, sans gêne après avoir été si proches ? Je sais bien que certains, comme mon amie Lemon, y arrivent bien, et tant mieux pour eux. Mais c'est inconcevable pour moi. Encore moins après une relation sérieuse, soldée par une rupture inexistante. Un départ silencieux, inattendu, dans la nuit. « That’s why I didn’t call ; I regret that now, obviously, but it’s easy to regret something afterwards, right ? » Mon regard retrouve le sien, malgré moi. Je lis dans ses yeux la peine et le regret, justement. Une infime partie en moi a envie que je me lève, que je le prenne dans mes bras. Mais je l'écrase aussitôt. Arrête. C'est lui qui a fait qu'on en arrive là, remember? « Right. » Une réponse inutile à une question qui n'en attendait pas une. Mais c'est vrai. Le regret, c'est facile, et surtout : « it doesn't change much. » Je me mords la lèvre inférieure, retenant mon venin, en le regardant dans les yeux. La méchanceté, non plus, ne servira à rien. Ça ne soulagera pas la peine, n'effacera pas le passé. Je suis là pour faire comme le petit Rachad me disait. Ce garçon de sept ans a la sagesse d'un vieil homme. Et en même temps, il en a vu passer des choses. De ce qu'il m'a raconté, et de ce que ses réactions à ce qui l'entoure disent de lui. Je l'ai rencontré à Calais, quand j'y passais mes jours et nuits, aidant comme je pouvais. Et dès que j'ai discuté avec lui, il m'a impressionné. Il avait déjà une base en anglais et avait vite appris, à la petite école du camp. On discutait souvent. Et un jour, il m'avait demandé pourquoi j'étais partie, moi aussi. Alors je lui ai raconté les grandes lignes. Et il m'a conseillé de dire ce que je ressentais, d'écouter, et de pardonner. C'est un peu comme ça qu'on survit avec le mal-être qui nous ronge. C'est sa mère qui lui a appris ça. Je lui ai donc promis que je le ferais, sans jamais donner de temporalité. Il sera content de savoir que j'ai suivi ses conseils. On est toujours en contact. Je l'ai revu il n'y a pas si longtemps que ça. Sa procédure de regroupement familial a abouti depuis un moment déjà, et il vit très bien chez sa tante, à Brighton.

« I started having second thoughts and regrets as soon as I landed in Vienna, back then. » La voix de Léandre me surprend, me sort de mes pensées. Je relève la tête, me rendant compte que je regardais mes mains sans les voir depuis un petit moment. « It took me two days to decide that I had to come back to London, and two more days to find a plane. But I swear to God I was coming back here to apologise for everything. Unfortunately, you were already gone. » J'entends ses mots, je les comprends, mais je n'y réagis pas tant pour ce qu'ils disent mais pour ce qu'ils sont. Des explications. Des explications que j'étais là pour demander, pour exiger. Mais seulement après avoir dit ce que j'avais sur le coeur. Mais il m'en prive, devant mes yeux. Je sens la colère monter en moi. Je veux lui dire de se taire, qu'il n'a pas le droit de me faire ça. De m'offrir ces excuses, comme pour tout réparer, sans m'avoir écoutée avant. Je suis celle qui a fait le premier pas. J'ai besoin qu'il me laisse faire mon chemin jusqu'à lui. Et puis il pourra faire le sien aussi. Mais je ne dis rien et lui continue de parler.

« I can’t explain what happened in my mind the day I decided to leave without a word. Even for me, it’s unbelievable, and so not like something I would do—God, I swear, if only you knew how much I regret it. » « Yes, well. It did happen. You left without a word. And once again, regret doesn't fix anything », je lâche, amère. Je ne suis pas venue pour entendre sa peine, il en est le seul responsable. Ses yeux me quittent pour chercher autre chose, à travers la fenêtre, dehors, bien loin d'un rappel d'une erreur d'un temps passé. Il reprend : « I didn’t think I could take care of you anymore. I felt that I failed Callie and the times were so disturbed, it seemed… I don’t know. I don’t know anymore. I’m not even sure I once knew why I left, it just seemed like the only option, and I know it wasn’t now. I take full responsability for all of this. All that waste. » Je l'arrête aussitôt. « Don't, okay? » Mais il ajoute : « I’ll never forgive myself for what I’ve done to you. »

Je prends une profonde inspiration, pour calmer ma colère, mais aussi pour me donner du courage. Je ferme les yeux et les rouvre sur son visage triste, inquiet presque. Mon cœur se serre, d'avance. « You did not need to take care of me. Not then, not ever. I have always been good on my own. Independent, yet reliable. You know that. It was a choice, mine, to let you in and rely on you. Because you let me. And maybe I was wrong, maybe I shouldn't have. Maybe I even took you for credit at some point, I apologize for that. » Je me lève, agitée par un mélange de rage, de frustration et autres émotions qui me traversent, et que je ne saurais décrire. Je me mets à faire les cent pas.  « It was nice to have someone who was there for me, for once. Instead of just me having to take care of everybody else. I guess I got caught up in that. » Dans ma vie, j'ai eu affaire à une mère instable, un frère jumeau aux humeurs changeantes, et je me suis retrouvée assez tôt à jouer au parent responsable avec les deux, la plupart du temps. Mon père a quitté ma mère - et mon frère et moi, par défaut - quand on était assez jeunes. Je suis restée en contact avec lui, en bons termes, même, parce que je comprenais. J'aime ma mère, mais j'aurais fait la même chose que lui si je pouvais. Et puis, finalement, mon père a trouvé la femme de sa vie, quelqu'un de très bien, et il s'est remarié. Ils m'invitaient à manger chez eux, on se voyait de plus en plus souvent. Il avait enfin trouvé son équilibre. Jusqu'à ce qu'une opportunité au travail ne se présente. Et il a donc dû partir, ce que je comprends aussi. C'était quelques semaines avant le départ de Léandre. Mais comprendre ne veut pas dire ne rien ressentir, ne pas être blessé, ne pas se sentir abandonné, oublié. Les choses n'allaient pas forcément bien non plus avec mon frère, marié à un homme que je ne supportais guère, et qui s'avérait être notre détestable cousin. Et notre folle mère filait le parfait amour dans je ne sais quel coin exotique avec un jeune homme de notre âge - fidèle à elle-même, en somme. Alors oui, mon fiancé était devenu mon seul repère, mon point d'ancre. « I did not expect you to do much for me, really. Especially after what happened with your dad. I just wanted you to be in my life. And to let me be in yours. It was my turn to take care of you, to stand with you, through it all. Whether you needed time and space away, or wanted me by your side 24/7. All you had to do was ask. But you didn't. Instead you left. Just like everybody else. » Je m'arrête, littéralement, et me retourne vers lui. « I thought that ring was a promise. » Ma voix est basse, calme, même pas tremblante. Je sens les larmes me monter aux yeux. Je les retiens tant bien que mal. « I should be happy, I guess... I was right. Marriage does mean nothing at all. » Je ris, ironique, en me passant les mains sous les yeux pour essuyer les larmes qui m'ont trahie. « I know you know this, but I need to say it: I loved you, and you broke my heart. And for what? You don't even remember. » Je lâche un soupir avant de me rasseoir.

« You know I spent months wondering why. What had I done that was so wrong that you had to leave? Had I asked for too much? Had I made you feel like you couldn't talk to me? And one question always came back to haunt me: why didn't he say anything? » Je pose ma main sur le bureau et me penche un peu vers lui, plantant mon regard dans le sien. « Why couldn't you even just... leave a note? A text? Anything. I would've waited. »


Dernière édition par Laureline M. Faure le Lun 11 Sep - 23:49, édité 6 fois
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MessageSujet: Re: i hate to turn up out of the blue uninvited. (lauréandre)   i hate to turn up out of the blue uninvited. (lauréandre) Icon_minitimeMer 16 Aoû - 18:11

S'il avait naïvement cru une seule seconde qu'il aurait pu s'en sortir avec une conversation rondement menée, maîtrisée, il aurait été rapidement contredit. Mais Léandre sait à quoi s'en tenir. Une petite voix, tirée du fond de ses entrailles, le lui a murmuré dès qu'il a vu le visage de Laureline dans l'encadrement de sa porte ; dès qu'il a su qu'elle était là, même, dans cette vieille maison qui habite ses créations, un monde un peu particulier dans lequel il vit, dans lequel il s'enferme, parfois. Et tandis qu'elle s'exprime, se laissant aller à la colère qu'elle ressent, visiblement toujours aussi violente malgré les années, la maturité, la distance et le deuil qui a dû se faire, malgré lui, malgré eux, il se trouve de plus en plus insensé, de plus en plus coupable, aussi. Parce que son départ n'a pas eu pour seule conséquence la rupture de leur couple. La parenthèse imposée dans leur histoire, qui, si elle ne reprendra sans doute jamais telle qu'elle était, n'est tout de même pas complètement achevée, la preuve en est de sa présence ici. Il a causé bien plus de tord qu'il ne pourra jamais l'admettre. En partant, il n'a pas seulement brisé le coeur de Laureline, il a fait pire que ça ; il lui a donné raison. Raison dans le sentiment d'abandon qu'elle ressent sans doute depuis des années, à cause de sa mère, à cause de Tristan qui a parfois fait des choix étranges que personne, encore aujourd'hui, ne parvient à lui faire analyser ou ne parvient à comprendre. Pourquoi a-t-il fait le choix d'épouser son cousin, de l'aimer en premier lieu, de vivre cette vie bizarre qui l'a éloigné des gens, des autres, d'eux. Pourquoi leur mère a-t-elle toujours été si étrange, tellement à côté de la plaque, pourquoi Gregory était-il si insaisissable. Sous leurs airs d'enfants riches et gâtés, finalement, une fois la carapace écaillée, il ne reste que les ruines d'enfance dévastées par l'incertitude et l'absence de modèles. Léandre n'a pas grandi comme ça ; il a grandi au sein d'une famille soudée et aimante, dont l'opinion comptait plus que tout dans les choix de vie des uns des autres. La seule qui s'est écartée de cette vision n'est autre que Calliope, et elle l'a payé du prix fort, tout comme eux. Léandre n'a pas de carences, outre celle d'un père parti trop tôt, une fatalité qui arrive à d'autres que lui.

Il a ravagé son cœur, donc, mais il lui a aussi donné toutes les raisons de croire que la famille telle que lui l'affectionne ne peut pas exister. Sans se vanter, Léandre est un gentil garçon, qui aurait sans doute fait un mari agréable, attentionné et prévenant. Il l'aurait aimé comme elle méritait de l'être, parce que ça a toujours été le cas. Il a toujours voué à Laureline une admiration silencieuse pour ce qu'elle était, représentait, ou faisait, pour son caractère et ses idées, son approche des choses et des gens. Oh, Laureline Faure n'était pas demoiselle aisée, elle n'était pas calme, pas même toujours simple à suivre. Pourtant, il n'est pas de son avis ; le mariage ne veut pas rien dire du tout. C'est une chose formidable, et il en reste persuadé pour avoir vu ses parents heureux ensemble. Et Laureline mérite de connaître le bonheur que fut celui d'Astrée. Elle mérite d'être aimée comme sa mère l'a été, de pouvoir fonder une famille comme elle aurait pu le souhaiter. Léandre ne peut pas vraiment démentir, cela dit, il ne s’y sent pas légitime. Il la laisse parler, déverser les reproches qu’elle ressent de manière assez logique et raisonnée, pour le coup.

Le corps de Léandre se tend, et ses doigts emprisonnent le stylo avec lequel il jouait quelques secondes auparavant. Réflexe de défense, sans doute, son cœur se braque en même temps que le reste à mesure que les mots passent ses lèvres, durs, sans aucun doute. Il ne sait pas quoi faire de sa peine, ce qui lui rappelle les raisons qui l’ont poussé à fuir, autrefois, à la laisser là sans rien dire. Parce qu’il avait peur de la décevoir en ressentant le besoin d’être seul, de faire le point. Parce qu’il avait déjà été difficile de la convaincre de l’épouser, il était persuadé qu’elle finirait par renoncer, par le quitter, soit en le voyant affaibli par une peine qu’il ne comprenait ni ne quantifiait lui-même, soit en le sentant prendre ses distances, comme s’il n’avait pas complètement confiance en eux. Ce n’était pas le cas, il avait sans doute effectivement besoin simplement d’un peu de distance, et à avoir peur qu’elle le quitte, il avait finalement récolté exactement ça. La fin de leur couple. Les reproches le blessent, cela dit, sans doute parce qu’il se sait coupable de ce qu’ils cachent.

Il prend une inspiration pour maîtriser sa voix et son ton, surtout, pour ne pas paraître trop agressif ou sur la défensive. « I perfectly know you don’t need anyone to take care of you properly, Laure », il réplique, un peu sec, sans doute, plus qu’il ne l’aurait souhaité, fermant les yeux quelques instants. Il repose le stylo face à, prenant soin de l’aligner parallèlement aux pots qui ornent son bureau. « But knowing it doesn’t mean I didn’t want to take care of you back then », il complète. La nuance est complexe mais bien réelle ; Léandre s’est toujours su face à une femme indépendante et forte, capable de s’occuper d’elle-même et sans doute bien mieux que bon nombre d’autres personnes. « I didn’t want to be the one crying on your shoulder. It was probably an ego problem, something… I don’t even know how to explain that properly, really », complète-t-il, sachant pour autant qu’il va devoir se mesurer à la tâche, parce qu’elle n’est pas venue ici pour récoler simplement des je ne sais pas qui ne lui apporteront rien de plus que le gâchis monumental accumulé ces dernières années. « I felt terrible… weak and powerless, unable to stand up or to take any right decision. It was the most selfish thing I’ve ever done in my life, but my brain wouldn’t let me do otherwise. I was obsessed with the loss I’d just been through. It didn’t last long, but everything I saw was dark and unfair, and Vienna seemed like the right place to be to live all that. I needed to be on my own because I was ashamed of what I felt. I was old enough to lose my father without going nuts, and yet again, all I wanted to do was break and die – not as in a suicide wish, but because my heart felt broken, too ». A défaut d’explication rationnelle, il tente toutefois d’expliquer sa vision des choses de l’époque, comme une transe particulièrement violente dont il était alors incapable de se sortir. « It’s not only you. I rejected everyone. Tristan, my mother, my family, Cally. It only took me a few days to come back to my senses », il poursuit. Il ne cherche pas à se justifier, simplement à expliquer. « But it was too late ».

« I know why you came today. To say all that, to let the pain out and get explanations. You can yell at me because yes, what I did was wrong, and yes, I should have left a not, sent a text, an explanation, anything. But I can’t really justify myself, can I? I don’t even think I should try, because it wouldn’t help you. You feel offended and you have all the rights to. There’s nothing I can say that would make you feel better or would make us better. That’s unforgivable and I understand why », finit-il par lâcher, défaitiste, sans doute. Mais Laureline n’est pas venue à lui pour qu’il se batte pour retrouver ce qu’ils ont perdu. Il est trop tard, sans doute. Les années ont rendu Léandre moins optimiste, plus défaitiste. « Regret doesn’t change anything. Actually, I just can’t change anything. And I really take full responsibility for that as well, but Laure – you did run away as well. You didn’t trust me enough to think I’d come back quicker than I left. You ran away from the way I was trying to work my pain out », finit-il par lancer. Il le regrette presque aussitôt, parce qu’il n’a pas envie de lui mettre ça sur les épaules. Parce qu’il est responsable, il le sait, mais quelque part, son cœur, injuste sans doute, ne peut s’empêcher de lui en vouloir, un peu, aussi. « If you had waited just a week… » il murmure, ses yeux humides à leur tour, parfait miroir de la jeune femme en face de lui. Elle ne lui pardonnera sans doute jamais cette bassesse, mais elle est sans doute venue pour faire table rase du passé, et c’est un travail à double sens. « You know, actually, nobody ever gave me the right to fail anything properly. I think I needed to blow everything up for once in my life and I paid the high price for this ». Ses mains se croisent et il prend une inspiration, retire ses lunettes pour balayer l'humidité de ses yeux. Il ne s'est pas rendu une seule fois au cimetière depuis l'enterrement de son père, il y a des années de ça. « I'm sorry, Laure. If I knew what to do to make you feel better about all that, I would do it. But I don't have the answers to your questions myself ».
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