ihc ✖ Le passé est à oublier |END|

« Monsieur Cohen ? » « Oui c’est moi ? Comment ça s’est passé ? Je peux aller les voir ?! » « Eh bien justement je viens vous parler d’eux. Disons qu’il y a eu quelques complications durant l’accouchement… » Le visage blanc, tête baissée presque l’air honteux, le médecin qui aurait normalement dû dire « ils vont très bien, allez donc les voir dans le bloc numéro six ! » n’eut rien d’autre à dire devant la peur du cher Monsieur Cohen qu’un « Je suis vraiment désolé, nous avons fait tout ce que vous pouvions pour la sauver, mais l’hémorragie était vraiment trop importante pour qu’on arrive à l’arrêter… » Un silence de mort, et c’était le cas de le dire. Lui qui était arrivé ici, à l’hôpital, avec sa femme ne pensait en aucun cas repartir sans.  « Mais nous avons réussi à sauver votre fils monsieur… Nos sages-femmes s’occupent avec grand soin de lui, je peux vous y accompagner ? » Le visage blanc, presque sans vie, il hocha la tête, muet. Triste. Anéanti. On lui avait toujours appris à gérer ses émotions, ne jamais laisser paraître quoique ce soit, même pas une once de joie ou bien-même dans ces cas-là de tristesse. Ce serait montrer des semblants de faiblesse et ce n’est pas acceptable. Il venait de perdre sa moitié, la femme de sa vie, la mère de son fils. Mais il ne bronchait pas, à la plus grande stupeur des médecins présents. « Où est-il ? » Le médecin poussa légèrement la porte du bloc, où l’on pouvait voir deux infirmières chouchouter le nouveau-né. L’homme passa ladite porte et se hissa entre elles pour pouvoir le regarder, un léger sourire sur les lèvres. « Isak. » Les infirmières s’apprêtèrent à noter le nom du jeune enfant. « Isak Haim. » Il s’avança près de l’enfant et tendit les bras vers lui, le portant jusqu’à sa poitrine le cajolant.  Il était déjà en pleurs, comme s’il était au courant. Comme s’il se doutait que jamais il ne pourrait connaître sa mère.


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« Isak ! Lève-toi maintenant, c’est l’heure ! » Papa adore me hurler dessus dès le réveil, comme s’il voulait directement me mettre dans le bain et dans l’ambiance de la journée. Formidable. Il n’est pas si méchant, même s’il aime bien se faire entendre, je vous promets c’est plutôt le genre à parler fort mais être tout doux à l’intérieur. Il faut juste savoir le caresser dans le sens du poil, si vous voyez ce que je veux dire. On est le onze aujourd’hui, papa est assez stressé et même de mauvaise humeur ces temps-ci. Et c’est comme ça depuis maintenant dix-sept ans. J’ai toujours été absent cette semaine, et ce depuis que je commence l’école. Papa refuse que j’aille en cours à l’approche de ma date d’anniversaire, et en quelques sorte, la sienne. C’est fou, j’ai beau ne jamais l’avoir connue, j’ai l’impression permanente qu’elle est toujours à mes côtés, à nos côtés. Il fait beaucoup de conneries, le vieux, il faut dire ce qui est, il n’a jamais était doué mais a toujours fait de son mieux, et je suis certain qu’elle sera heureuse du résultat.  « Bouge tes fesses de larve ! » Vous voyez, ce sont ces mots doux, ces mots d’amour, sa façon de me dire qu’il m’aime. On s’y fait rapidement, je vous promets ça en devient drôle quelques fois même. Je me demande comment aurait était les choses avec elle. Je veux dire, toutes ces années,  comment ce seraient-elles déroulées avec la présence de maman avec nous. Papa et moi vivons dans une magnifique demeure avec mes grands-parents paternels trop vieux pour qu’on les laisses seuls. Ca fait toujours plaisir d’avoir de la famille constamment avec nous. J’aurais vraiment adoré qu’elle soit là, pour ma majorité. Mes dix-huit ans. Je suis certaine qu’elle aurait été fière de moi, de la manière dont je m’occupe de papa lorsqu’il lâche prise.  Et même lorsqu’il me reproche d’avoir été la raison de son décès, je me sens obligé de ne pas réagir, de le prendre dans mes bras et de le serrer de toutes mes forces. Ça lui fait autant de mal qu’à moi, d’avoir perdu la femme de sa vie, ma mère. Il ne pense pas réellement ce qu’il dit, il boit juste un peu trop de temps à autre. Ce n’est certainement pas excusable mais je ne peux pas lui en vouloir. Vraiment pas, je m’en veux aussi à moi. Je me dis que peut-être cela aurait pu se passer autrement et qu’on serait trois ici maintenant. Je me sens idiot de penser parfois que je suis la cause de son décès, je n’y pouvais rien. Après tout comment un nourrisson peut être la cause de la mort ? N’est-ce pas ? Heureusement qu’il est là. Kamille. Mon meilleur ami est de loin la plus belle chose qui me soit arrivé ces dix-sept dernières années. Un être vraiment merveilleux : intelligent - drôle – beau – courageux  et j’en passe d’autre ! Il est réellement le frère que j’aurais rêvé d’avoir, mais au lieu de ça je comble le manque avec un meilleur ami. Mais il est aveugle. Voire même idiot, pas très futé je dois l’avouer. Je ne compte plus le nombre d’allusions stupides et risquées que j’ai essayé de faire à son encontre. « Isak, t’as encore de la crème chantilly sur le coin de la bouche, essuie toi espèce de dégueulasse. » « Bah lèche voyons. » Et après ça il n’est même pas capable de voir ce que je ressens. De la plaisanterie, des blagues oui c’est ça Kam. Je pense qu’il est bientôt l’heure qu’il sache ce que je ressens pour lui. Peut-être que le jour de mes dix-huit ans serait une bonne occasion de tout lui dire. Ce serait un poids en moins. Et s’il réagissait mal ? S’il ne voulait, encore une fois, ne pas y croire ? Et … et s’il me tournait le dos après ma déclaration ? Mh. Trop de questions pour si peu. Nous verrons bien ce qu’il en sera samedi.

→ Mais je t'en prie, assieds-toi donc... Tu tombes bien, je reprendrais bien un... un verre. Tu me l'offres ? Ahah, salut. On se connait ? Ton visage ne me dit strictement rien du tout. Mais c’est pas important, on est là pour faire de nouvelles rencontres, non ? Tu veux un verre ? Mh, ça tombe bien tu veux bien m’en ramener un en allant chercher le tien ? Et en galante jeune fille tu vas me l’offrir j’espère non ? Allez, sois pas méchante, je suis certaine que tu peux !

→ Une triple vodka pour moi, de façon au point où j'en suis tu sais, je suis plus tellement à ça près. Et puis de toute façon, ça aide à voir les choses plus belles, tu crois pas ? Je prendrais juste un verre de limonade s’il te plaît. Y a rien de plus dégueulasse que ce genre de boisson. Le goût est horrible, et puis pour l’utilité que ça a. Je n’aime réellement pas l’alcool, je n’y trouve aucun intérêt, t’es juste plus bête que tu ne l’es déjà quand tu bois alors à quoi bon. Ta santé va en prendre un coup ma jolie, tu ne voudrais pas la niquer autrement dis ? Moi j’ai pleins d’idée mais faut savoir si t’es ouverte … d’esprit ahah.

→ Je bois souvent, moi, il faut croire que les choses ne sont pas si belles dans ma vie de tous les jours... Je crois que c'est à cause de l'amour, quelque chose comme ça. T'as déjà été amoureux, toi ? Ah l’amour. Quelle connerie, c’est tellement beau quand c’est réciproque, et tellement de la merde quand la personne que tu aimes est plus aveugle qu’une taupe sans yeux. Tu dois bien connaître ça toi dis donc pour boire comme un vulgaire trou.  Je suis amoureux depuis bien longtemps et toujours de la même personne en plus. Quel con je fais à m’accrocher à quelqu’un qui ne m’aime pas hein. Je devrais peut-être boire, ça m’aiderais à lui avouer au moins, tu ne crois pas ?

→ Moi je suis amoureuse de mon professeur de psycho qui n'est plus mon professeur mais entre nous, c'est impossible. Un peu comme Romeo & Juliet, d'ailleurs, ce qui est assez drôle mine de rien. Tu fais quoi dans la vie, sinon ? Je peux comprendre, mais bon le regard des autres on s’en tamponne bien l’oignon non ? Ahah. Et bien ça fais plusieurs années que je suis étudiant en bio analyse, les petits rats de laboratoire bah c’est moi tu vois ! Et toi mise à part te saouler la gueule tu fais quoi ?

→ Oh c'est drôle ça. Enfin non, d'ailleurs, pas tellement. Moi je suis actrice, ça c'est drôle tu trouves pas ? Tu veux un autographe ? Actrice ? Ca va te faire une belle jambe de boire comme ça dans un tel bar, tu ne devrais pas en fréquenter de plus … reconnus ? Non parce que celui-ci sens le chacal et le gamin de quinze ans qui se tape une br*nlette derrière le canapé là-bas parce que tu es trop mignonne pour lui. Non mais sans déconner, je le veux bien ton autographe mais ça dépend où tu le fais et avec quoi.

→ Je crois que je vais t'embrasser maintenant, j'en ai vraiment trop envie. Non en fait, j'en suis sûre, tiens. T'embrasses bien, ça va. Tu viens souvent ici ? Parce que j'ai l'impression que c'est la première fois que je te vois, et pourtant je suis une habituée. T’es plutôt une fille entreprenante toi dis donc ! Pis t’embrasse bien, mais l’arrière-goût de vodka est vraiment pas très génial, tu veux un chewing-gum pour faire passer l’haleine ? Non parce que sinon tu m’approches plus. Ou alors d’un peu plus loin. Non je rigole y a juste que ce n’est pas trop classe pour une nana comme toi tu vois, tu n’envoies pas une superbe image aux gamines de douze ans qui veulent te ressembler. GG meuf.

→ Je vois. Mais, tu es venu tout seul ou tes amis sont dans le coin ? T'as des amis, pas vrai ? Seul. Ca fais du bien de sortir de boire un verre comme ça pis de faire de nouvelles rencontres. Mais oui évidemment que j’ai des amis(es) et encore une chance, la vie serait bien triste sans des personnes comme ça sur qui compter à n’importe quels moments de la nuit ou même en journée. Il faut avoir des amis, sinon la vie devient rapidement triste, et on fini par se faire bouffer, la vie va comme ça.

→ Et en dehors de tes amis, tu es célibataire ou pas ? Célibataire, je ne t’aurais pas laissé m’embrasser comme ça sinon, réfléchis. La personne que j’aime n’a toujours pas ouvert les yeux depuis bien des années mais je persiste à rester silencieux et lancer de petits appels comme ça de temps à autre, en espérant qu’un jour il ouvre ses paupières putain.

→ D'accord. Et tu vis chez tes parents ou tu as ton propre appartement ? Pour l’instant je suis seul dans un appartement assez beau je dois l’avouer. Merci papa je devrais plutôt dire, mais le week-end que je me sens seul je rends visite à ma famille, voir même je dors là-bas. Je hais être seul, la solitude c’est ma première source d’angoisse à vrai dire.

→ Super, on peut aller chez toi alors ? Je vais plutôt te raccompagner chez toi Cendrillon, t’as pas l’air assez en forme pour ne pas causer d’accident sur ton passage. Pis avec les petits chiens derrière ton beau petit cul crois-moi, il vaut mieux éviter de sortir seule comme ça, surtout avec ton accoutrement. Tu me remercieras plus tard va, c’est gratuit pour cette fois-ci.