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 Hard Day's Night [Fab & Evey]

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MessageSujet: Hard Day's Night [Fab & Evey]   Hard Day's Night [Fab & Evey] Icon_minitimeLun 11 Sep - 2:51




fab // evey.

hard day’s night.


    Soho la nuit est un endroit tout particulier. L’ambiance y est légère mais tendue, grésillant d’excitation et bourdonnant du bruit des conversations et des rires. C’est l’endroit parfait pour se changer la tête un vendredi soir après une longue semaine de travail et une journée chargée. Les garçons et les filles sont beaux, se trémoussent et la foule vibre d’un mouvement homogène au rythme du beat et des verres qui se vident et s’entrechoquent.
Au milieu de cette cohorte, Evey la douce est elle aussi fiévreuse. Ses yeux sont brillants, ses joues rosées et son corps mince ondule dans une robe courte qui ne ressemble pas à son style habituel. Perchée sur ses talons hauts, la naissance de la poitrine découverte, elle s’étonne elle même par son sens du rythme inopiné et bienvenu. Elle tient dans la main un gin tonic, qui n’est pas le premier de ce soir et ça explique ses yeux fous et son visage heureux.

Elle avait les yeux baissés sur son mémoire, occupée à le relire, lorsque sa collègue Yulia l’avait rejointe derrière le comptoir, un sourire malicieux collé sur le visage. Son meilleur ami sortait avec quelques amis et elle allait les rejoindre, voulait savoir si ça dirait à Evey. Elle avait bien besoin de se détendre un peu, c’était la fin de l’été et avant la reprise des cours Evey devait prendre une soirée pour rigoler et s’amuser. Cela faisait déjà plusieurs fois que la jeune étudiante se joignait à eux pour des soirées.

À Soho, les garçons et les filles attirants ne manquaient pas. Yulia savait pour l’incident et selon elle, il était temps qu’Evey se remette dans le bain. Yulia était une wingwoman extraordinaire et les deux dernières sorties, la timide blondinette était rentrée accompagnée. Elle était passé de zéro activités à 100% de réussite, et ça lui faisait bizarre. Seulement cette fois-ci, Evey avait hésité. D’abord, elle n’avait rien à se mettre et pas vraiment le temps de rentrer chez elle si elle venait, finissant tard. Elle voulait nourrir le chat. Il y avait une émission sur les créatures mythologiques hybrides à la télévision. Et elle n’avait aucune idée de si coucher avec de presque parfaits inconnus avec 4 grammes d’alcool dans chaque bras était une bonne idée. Pas que ça lui déplaisait, non, mais elle se souciait des effets à long terme.

Yulia avait insisté, ça serait fun, Evey pouvait demander à sa voisine d’en face d’aller câliner Earl of Grey, et elle-même lui prêterai une robe, des talons et du maquillage. Alors Evey avait abdiqué. Les deux amies s’étaient dirigées vers Shoreditch où Yulia partageait un appartement avec quatre autres filles, toutes plus artistiques et sexy les unes que les autres. Si tu as réussi à choper en étant habillée normalement, Yulia lui avait soufflé, imagine ce que tu vas pouvoir faire quand je t’aurai faite bonne. Evey avait eu un petit rire bête, mais Yulia, en bonne Londonienne, avait un placard rempli de robes plus courtes les unes que les autres, de chaussures qui ressemblaient plutôt à des échasses, et de sacs dans lesquels on rentrait à peine son téléphone, sa carte de crédit et deux condoms. Âgée de quelques années de plus qu’Evey, elle avait naturellement décidé de la traiter en petite sœur et elle passa presque une heure à lui faire essayer de multiples assortiments avant de la coiffer et de lui expliquer comment appliquer de l’eye-liner.

L’exercice était éprouvant pour la réservée jeune fille mais quand elle croisa le résultat final dans le miroir, elle en resta sans voix. Certes, elle avait regagné en confiance les derniers mois, mais là, elle se trouvait carrément sexy. La robe était noire, toute simple et avait la longueur d’une minijupe, des bretelles, et un décolleté bénitier dans le dos. Le tissu était velouté et cintrait son corps, dévoilant ses épaules piquetées de tâches de son, et une bonne partie de ses jambes. Ses chaussures étaient également noires, ouvertes et les talons faisaient bien une dizaine de centimètres, soit plus du double de ce qu’Evey portait habituellement, mais pour l’instant elle tenait dessus à peu près en équilibre. Il fallait simplement qu’elle s’habitue. Ses cheveux étaient attachés en un messy bun, révélant son cou gracile et ses oreilles ornées simplement de deux anneaux argentés. Son maquillage était simple, un rouge à lèvres foncé et un trait d’eye-liner, eyebrows on fleek, c’était tout. Yulia avait reculé de quelques pas pour admirer son travail, sifflé et lui avait donné une tape amicale sur la cuisse avant de la complimenter. Là encore, Evey avait gloussé, ravie. Yulia s’était préparée pendant qu’elles buvaient déjà quelques verres puis elles avaient repris le métro vers Soho, Evey ravie de sa toute nouvelle confiance en elle qui lui permettait de parler distinctement et sans bégayer, et donnait à son anglais un côté légèrement cockney.

Quelques heures plus tard, le chignon légèrement défait, dans la chaleur d’un club, elle danse sans s’arrêter, nullement gênée par le contact avec les corps qui l’entourent. Elle retourne au bar se commander une autre boisson, et engage la conversation avec une fille aux cheveux courts, en chemise et pantalon cigarette. Evey admire son élégance. La fille, Ava, la complimente sur sa tenue. Quelques drinks plus tard et leurs bouches sont collées l’une contre l’autre alors qu’elles sont blotties dans une alcôve sur une banquette. Pourtant, Ava se lève, doit partir, boulot le lendemain, il est déjà tard. Evey comprend. Ava laisse son numéro et prend celui de la jeune fille, promettant de la rappeler, lui assurant qu’elle est adorable, etc. Evey rougit, remet une mèche de cheveux en place, et alors qu’Ava quitte le club, se lève et se dirige de nouveau vers le bar. Il est déjà presque deux heures et la fête bat son plein. Evey récupère son verre et tente de se frayer un chemin à travers la foule. Le lieu est bondé et Yulia et ses amis sont de l’autre côté de la salle. Elle les hèle et ils agitent leurs mains, lui faisant signe de les rejoindre avec des sourires entendus. Elle presse le pas, et ce faisant, renverse presque son verre sur un jeune homme contre qui la foule la pousse. Lorsqu’elle relève le nez vers le visage de l’inconnu qui, grâce à ses talons, n’est pas beaucoup plus grand qu’elle, elle réalise que c’est lui.

« What the- »

Il ne manquait plus que ça.

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Raffaello O. Cassio


Raffaello O. Cassio

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MessageSujet: Re: Hard Day's Night [Fab & Evey]   Hard Day's Night [Fab & Evey] Icon_minitimeVen 29 Sep - 8:23


C’est la fête, Jack part cette nuit pour la Grosse Pomme. Un mélange complexe d’émotions qui domine Fab. Il est heureux, triste, excité, effrayé. Jack c’est Jack. Il a invité ses collègues, ses amis, leurs colocataires et leurs voisins. Une trentaine d’entre eux se sont déplacés afin de s’éclater une dernière fois avec leur ami américain. Fab est assis avec une fille sympathique, une collègue de Jack. Il regarde son mate danser sur une table, de la bière imbibée dans son t-shirt, de la mousse blanche pas encore léchée sur ses commissures. Il rit à l’image, sirotant avec paresse son breuvage. Ses pensées vagabondent comme il étudie les autres saynètes du bars, les paires se French kissant, les filles criant, les garçons rôdant à la recherche d’une proie, leurs canons sortis. Et lui qui observe nonchalamment, un Balzac de nos jours.

Ce qui le surprend, c’est cette inhibition qui le prend d’assaut. Comme s’il était impossible pour lui de joindre le rythme, de se mêler au battement de la vie, tant ses remords pèsent lourdement, le clouant à la banquette. Son estomac vit une dichotomie qui lui donne la nausée : ses tripes veulent danser parmi la foule, dans l’insouciance et la témérité, mais tout son corps le fige, le retient, le détient sous la prison de ses os. Londres s’est comme vêtue d’un linceul opaque et il reste à Fabien de l’écarter pour découvrir s’il reste de la vie derrière le tissu maudit ou si bien le dernier souffle de la ville a été poussé. Si tel est le cas, peut-être serait-il temps pour lui de retourner sur les géantes et jeunes prairies de l’Amérique, d’y courir, d’y rouler et d’abandonner la sèche amertume du Vieux Continent. Il glousse à cette tragique idée. Néanmoins, tout lui indique cette direction, c’est toujours à l’Ouest que son regard tend, que ses pieds le poussent. Mais il récupère toujours cette incroyable aspiration. Peut-être est-ce là le sort cruel de l’écrivain, mais Londres est un chapitre et il ne peut l’interrompre si tôt. Ou du moins, il doit en écrire la fin, car son exil est loin d’avoir abouti. Seulement, le voilà un peu à court d’inspiration. Tant de prénoms virevoltent dans sa tête, des idées de rancoeur, des souhaits de concorde. Il ramène le verre à sa bouche, goûtant au rhum sucré de son drink, la couleur cyan de celui-ci pétillant sous les faisceaux des stroboscopes.

« Alors, t’as écrit un livre? »


Hissé hors de ses rêveries, Fab se retourne vers son interlocutrice. Ses cheveux châtains ondulent avec une perfection démesurée autour de son visage, suggérant à Fab que le temps qu’elle a passé à les manier se comptent en heures. Même chose pour son maquillage, l’agilité parfaite des couleurs et des contours sur son visage présument une dextérité sans équivoque.

« Ouais. Je ne pense pas le refaire de si tôt. »

« Pourquoi pas? C’est sexy, un gars qui sait utiliser sa plume. »

Fab hausse le sourcil, rigolant à l’attitude de la fille.

« Tu aimerais bien me voir couler de l’encre, j’imagine? »
renchérit-il.

Elle s’esclaffe, crachant quelques gouttes de son breuvage violacé. Les deux jeunes rient un moment.

« Sérieusement, ça m’intéresse. De quoi parle-t-on bouquin? »

Fab hésite un moment, rassemble ses idées.

« Ça explore le thème de la solitude, en essayant de la montrer sous toutes ces formes, tous ces angles. C’est l’histoire de Mo, le protagoniste qui demeure sur une île tropicale plus ou moins déserte. C’est plus ou moins clair s’il y réside par choix ou s’il y est coincé. En face de son île, il y en a une autre, sur laquelle il semble y avoir une grosse fête. Pendant le roman, on essaie de comprendre pourquoi Mo n’y va pas… »

« Comme toi, alors. »
précise-t-elle, en pointant Jack et les troubadours s’éclatant, cognant leur tête contre l’air chaude de la boîte.

« Non. » nie Fab, gêné.

« Finalement, est-ce que Mo se rend à la fête? » demande-t-elle.

Fab sourit, cale son verre et le dépose avec conviction contre la table basse devant un, secouant celle-ci, faisant trembler lui et la jeune fille anonyme à ces côtés.

« On s’en fiche de Mo. »

Il attrape sa main, un vieux sourire sur ses lèvres, un sourire dont il se souvient, un sourire qui lui a manqué. La fille dépose une main douce dans la sienne, dans un geste délicat qui contredit l’empressement de Fab dans un portrait des plus épiques. Le garçon l’entraine sur la piste de danse. Jack les aperçoit, bondit dans leurs bras. Le premier pas vers la liberté, pense Fab.

Whatshername danse, danse, danse, tourne dans toutes les directions, Fab suit son mouvement avec aisance et confiance. Ils font presque l’amour, tant dans leurs déplacements sont intimes, harmonieux. Fab échappe plusieurs fois l’occasion de lui soutirer son prénom, mais il sent son corps prendre préséance sur sa bouche, ses gestes estropier ses mots. Soudain, il bondit un peu plus, brandit le poing vers les dieux des bacchanales oubliées et hoche la tête dans les directions les moins opportunes. La fille fait de même, sautille, le rebord de sa jupe se hissant un peu plus à chaque rebond, dévoilant des cuisses brillantes. Fab s’y colle malgré la moiteur, lançant au passage un clin d’oeil à Jack qui est heureux de le voir s’amuser ainsi.

L’amie de Jack se retourne vers lui, extirpe un billet de vingt de sa bourse.

« Je vais nous chercher des verres. »

Fab hoche la tête, accepte l’alléchante offre. Il profite du départ de la fille pour lui-même s’égarer un peu dans la boîte de nuit, le regard distrait, à moitié à la recherche des toilettes, à moitié à la recherche d’un autre regard, comme s’il attendait le moment d’être interpelé par… n’importe qui, n’importe comment.

Aux chiottes, un mec se tire une ligne de cocaïne sur le rebord d’un lavabo jauni par l’usage, deux autres discutent autour d’un urinoir, un autre fume la cigarette dans une des cabines, sa subtilité minée par le nuage gris s’échappant vers le plafond. Fab se délie la vessie, puis retourne dans le labyrinthe de lueurs du bar, à la recherche de la belle fille aux longs cheveux. Elle n’est ni au bar, ni ailleurs.

Ses yeux dérivent comme il est bousculé, seulement pour se flanquer contre une vision terrifiante et belle. Il la reconnait, instantanément, la stupeur l’ébranle et sa poitrine s’éclate. C’est comme un souvenir, mais différent, maquillé et frivole, à la frontière entre le cauchemar et le rêve. Il ne dit rien, ses lèvres lourdes et égarées l’une de l’autre, témoins de sa surprise.

« Evey. » sa voix obtempérant enfin, sans ne pas craquer légèrement.
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MessageSujet: Re: Hard Day's Night [Fab & Evey]   Hard Day's Night [Fab & Evey] Icon_minitimeVen 29 Sep - 20:38




fab // evey.

hard day’s night.


    La vision embuée par l’alcool et les paupières loudres, Evey dévisage Fab. Il la reconnaît, il dit son nom. Le temps semble passer au ralenti. Elle regarde par dessus l’épaule du garçon et voit ses amis attablés, en train de rire. La voix de Fab résonne dans sa tête et elle revient à la réalité en un instant. Toute la colère et la tristesse accumulées lors des derniers mois lui reviennent. La rage monte en elle. Et aussi un sentiment qu’elle n’avait pas ressenti, depuis la dernière fois où elle s’était réveillée seule dans le lit mais avec encore la chaleur d’un autre corps qui s’étiolait. Elle s’était levée, avait titubé jusqu’à la cuisine où Fab l’attendait. Elle n’avait sû quoi dire. Lui non plus. Il avaient échangé quelques paroles banales et la porte de l’appartement d’Evey s’était refermée sur Fabien. Par la fenêtre elle l’avait regardé partir.
La musique est assourdissante dans le club pourtant elle ne l’entend pas, ne ressentant que les vibrations des basses entre ses côtes. A moins que ce ne soient les battements de son cœur. Elle pensait l’avoir oublié, n’en avoir plus rien à foutre de lui. Elle se rend à présent compte qu’elle avait tort. Elle glisse de nouveau un regard vers ses amis qui l’observent, interloqués, interrogateurs. Puis elle laisse faire son instinct.

Sa main s’élève toute seule vers le visage de Fabien, ses doigts tremblant entrent en contact avec la peau douce de la joue du jeune homme. Elle esquisse un sourire, et se hisse sur la pointe des pieds. Avant qu’elle n’ait eu le temps de réfléchir ses lèvres frôlent celle du jeune homme, puis s’y appuient plus fortement. La tête lui tourne et elle se sent légère, prête à flotter. Elle ferme les yeux et sa main s’enfonce doucement dans les cheveux de Fabien. Elle savoure l’instant, le contact des lèvres douces, le goût de l’alcool, son odeur quelque peu effacée, la chaleur de son corps contre lequel elle se presse. Une étrange chaleur lui monte au visage, et alors elle revient à la réalité. Elle interrompt le baiser, ôte sa main et le repousse.

C’est à ce moment précis que toute la colère lui remonte et qu’elle voit rouge. Son visage l’instant d’avant apaisé se tord en une grimace furieuse, elle fronce les sourcils, sa bouche devient une moue tendue, et elle s’écarte d’un pas.

« You fucking wanker. »

Elle crache ces mots, et l’instant d’après, la même main juste avant douce et tendre se raidit et elle gifle Fab de toutes ses forces. La laisser des mois sans nouvelles, à tel point qu’Evey avait dû passer par sa mère qui elle même s’était renseignée auprès des parents de Fabien. Elle avait dû feindre la nonchalance, le désintérêt, la simple curiosité naïve. Elle avait dû taire ses inquiétudes et sa tristesse, le sentiment d’abandon, la culpabilité. Il aurait pu lui arriver n’importe quoi. Elle n’aurait rien sû. Elle avait passé des mois à se blâmer pour la disparition du Canadien, à se ronger les sangs, à broyer du noir, avant que finalement Yulia la récupère et lui réapprenne à vivre.

La douleur qui traverse sa main lui indique à quel point la gifle a dû être douloureuse de l’autre côté. Elle s’en fiche. Elle le contourne, le bouscule un peu, se dirige vers ses amis. Yulia pose sa main sur son épaule, demande ce qui se passe.

« I’ll explain later. I have to go. »

Personne n’ose protester, la jeune femme attrape son manteau et son sac. Juste avant de partir, elle se tourne une dernière fois vers son amie à la peau brune.

« Thanks for the dress. »

Elle enfile son manteau, balance son sac sur son épaule, et se dirige à grandes enjambées vers la porte.

La rue est bruyante, mais il y fait plus frais et plus sombre. Evey s’enfonce dans la foule en marchant aussi vite qu’elle peut, en courant presque. Elle s’essouffle, joue des coudes, repousse les mains qui se tendent vers elle et ignore les sourires et les mots. Elle se retourne mais ne voit pas Fab. C’est tant mieux, se dit elle sans y croire vraiment. Elle aurait espéré qu’il vienne à sa suite, qu’il la rattrape, qu’il la prenne dans ses bras. Mais ça non plus elle n’y croit pas. Elle sent les larmes qui commencent à monter et secoue la tête, s’oblige à se calmer. Elle ralentit un instant, ouvre son sac, sort une cigarette du paquet et cherche le briquet. Elle réalise qu’elle l’a laissé au mate de Yulia et marmonne quelques jurons. La clope au bec, elle s’arrête près d’un groupe de gars.

« You guys got fire? »

L’un d’entre eux fouille sa poche un instant pendant que ses potes font des blagues. Par politesse, Evey sourit avec eux. On lui tend un briquet, elle allume sa clope, le rend et s’apprête à partir quand l’un d’entre eux, vêtu d’un blouson en jean et d’un pantalon noir, l’interpelle avec un fort accent écossais.

« Oi lassie, you okay? You wanna come have fun with us ? »
« Huh, no thanks. I’m just fine. Have a good one guys. »

Elle esquisse un mouvement pour reculer, mais ils insistent. Elle s’en va, ils commencent à la suivre et alors qu’elle accélère l’un d’entre eux attrape son bras en rigolant. Elle fait un grand mouvement du bras et s’arrache à son emprise, puis pousse le garçon de toutes ses forces, s’envoyant elle même valdinguer quelques mètres plus loin.

« What is wrong with guys nowadays, what the fuck ?! Just fucking leave me alone ! »

Celui qui l’a attrapée lève le bras et Evey baisse instinctivement la tête. L'adrénaline lui monte à la tête, elle recule. Deux d'entre eux ne disent rien et le dernier s'approche également d'elle. Il lui fait un sourire railleur et tend sa main vers elle.

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MessageSujet: Re: Hard Day's Night [Fab & Evey]   Hard Day's Night [Fab & Evey] Icon_minitimeSam 14 Oct - 23:47

Trois. Deux. Un. Action.

La mise en scène est terriblement parfaite. Les néons, dans leur zizanie, semblent se fixer contre les héros. Fab, l’antihéros contemporain, le saltimbanque des cœurs, figé dans son scénario manichéen, torturé par ses envies de hotshot émotif. Evey, l’héroïne qui porte bien son titre, une drogue inoubliable et , qui doit être jouée par l’actrice-caméléon aux archétypes de la girl next door et de la femme fatale, un mélange malsain de la demoiselle en détresse et de la final girl des slasher films américains. Les caméras tournent, mais l’acteur a oublié son texte, a oublié son rôle. Oublié le genre même. Il s’attend à de la violence, à de la peur, à des pleurs, à des rires, à de la guerre, à de la joie, à du dégoût.

Finalement, c’est l’amour, à sa surprise qui l’emporte. C’est sur la pointe des pieds qu’Evey se déplace, hissant ses lèvres près des siennes et la collision a lieu. Ils s’embrassent, sous les drapeaux bleus, rouges et verts des éclairages. V-J Day in Times Square a honte devant leur baiser. Ils sont jeunes, ils sont beaux et ils vivent les plus beaux jours de leur vie.

C’est comme un film, mais c’est pire : c’est la vie.

Puis, le générique se déroule, les amants disparaissant derrière les ombres des dernières pellicules. La magie du cinéma s’évapore, comme la brume des souvenirs elle-même se dissipe. Ils ne sont ni jeunes, ni beaux, mais brisés et raclés. Personne ne sait ce qui se passe après les end credits, personne ne sait de quoi a l’air le happy ever after. Le voilà, c’est une gifle contre la joue, un élan hurlé par le cœur.

Evey lui lance une insulte et, suivant le nom des acteurs sur l’écran, s’égare dans la foule. Fab ne peut s’empêcher de croire que c’est la fin, le vieux et talentueux réalisateur italien ayant imprimé fine en fines lettres blanches sur un fond noir. Tout tourne autour de lui, tout semble disparaître. Qu’arrive-t-il au héros après le film?

La vérité, c’est qu’il n’arrive rien. Le moment s’évanouit et laisse place à l’instant. Fab a la bouche sèche et la joue rougie, mais les lèvres douces et humides. La vie est étrange parfois, le voilà, au beau milieu d’un piste de danse, naguère si heureux, quelques secondes plus tôt, et maintenant comme piégé dans le désert, dans l’ignorance la plus totale. Tous les gens autour de lui, tous les murs et toutes les tables ne sont que des grains de sable et il en existe des milliards de tous les côtés. Et de l’un de ces côtés, invisibles à l’œil nu, se trouve Evey.

Fab titube finalement, cessant d’être martelé par les coudes et les hanches des fêtards. Son regard cherche Evey, mais elle n’est pas là. Ses amis dansent, Jack fait la fête et c’est bien ainsi. Du coin de l’œil, il perçoit les regards méfiants et haineux des amis d’Evey, qui le reconnaissent de leur table. Fab essuie leurs regards et s’excuse en baissant les yeux, tel un chien piteux. Il s’éloigne, navigue à travers la foule et s’arrête devant la porte menant vers la rue où il devine que son amie s’est enfuie. Sa poitrine se rapetisse, ses côtes s’entrelacent et l’étouffent. Hors d’haleine, il s’appuie contre le mur du bar, épiant un peu la rue, hésitant. Peut-être n’y a-t-il pas de happy ever after. Evey lui en veut, il s’en veut. Il était malade. Il l’est toujours. Son cœur se débat dans son torse, mais Fab ne sait dans quelle direction. Il est si effrayé, il préfèrerait affronter la mafia japonaise ou l’armée spartiate que d’aller parler à Evey. Ses jambes vrombissent, telles des feuilles martelées par le vent. Ses yeux se ferment, telles des écluses menacées par l’orage. Il ne peut pas. Il ne veut pas. Tout son être lui indique la voie à suivre, la fuite est si simple. Quel homme, devant une avalanche resterait planté là ou pire irait à la course à la rencontre des neiges? Toute personne censée se cacherait derrière une rocher ou un arbre. Fab l’imagine déjà : la parfaite fuite, des palmiers, le Brésil, la mer, les guitares, le portugais. Loin des pluies diluviennes de Londres, des rues étroites et sinistres, des Anglais épuisés et tristes. Loin d’Evey, près de Fab. Voilà la plus tragique des histoires. Le choc du garçon de l’Amérique et de la fille de l’Europe. Fab a le syndrome de ces ancêtres, la maladie de la fuite, l’adieu facile. Il devrait suivre Jack et tout laisser tomber. Au revoir l’Europe, l’Amérique m’attend à bras ouverts.

Et puis. Au diable. Fab relève la tête. Il ne peut laisser le Vieux Continent dans l’état qu’il est. Fab l’a empesté de sa fourbe et doit maintenant l’en soigner avant de retourner au Nouveau Monde. Il s’aventure dans la rue, court dans trop de directions, les néons jaunes des réverbères le guidant de leur mieux. Puis, il l’aperçoit, trois hommes l’encerclant, l’un avec le poing tendu. Fab ne réfléchit pas. Il court et s’interpose entre l’imbécile et Evey. Il ne se contient pas, il est dans tous ses états. Violemment, ses mains poussent les épaules de l’Écossais, lequel titube, mais est rattrapé par ses mates. Fab bondit sur lui-même, la rage dans les yeux, l’écume à la bouche.

« Get the fuck out of here, arseholes, before I beat the shit out of you punks! »

Les deux barjots silencieux saisissent leur ami et l’enjoignent à partir. Fab les effraie, il s’effraie lui-même. Finalement, l’idiot lui montre le doigt d’honneur, puis décampe avec ses mates. Fab respire rapidement, les épaules tendues et les poings serrés, regardant partir les trois hommes. Il retrouve son souffle peu à peu, mais refuse de se retourner. Ses doigts se libèrent et se détendent. Il aimerait qu’elle dise quelque chose, est-elle encore là seulement? Doucement, il se retourne vers elle, fuyant son regard de tous les côtés. Un silence pèse.

« Fuck… Just… Fucking say something, yeah? »
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MessageSujet: Re: Hard Day's Night [Fab & Evey]   Hard Day's Night [Fab & Evey] Icon_minitimeSam 18 Nov - 1:22




fab // evey.

hard day’s night.


   Le coup s’apprête à tomber, Evey rentre la tête dans les épaules, recule et se prépare à encaisser le choc. Ce n’est  pas la première fois qu’elle a peur d’un mec. Ils lui font tous peur. Même si elle se convainc du contraire, il lui suffit de les voir en bandes et, si elle est seule, son cerveau se met immédiatement en état d’urgence. Elle sert les dents, mais alors qu’une main devrait s’abattre sur elle, rien ne se passe. Ses doigts se détendent, tremblent et sa cigarette tombe sur les pavés mouillés de cette rue bondée du centre de Londres. Son premier réflexe est de la ramasser avant même de regarder ce qui a interrompu la trajectoire du bras. Tout va au ralenti, tout est flou, et le cerveau d’Evey lui indique que le plus important est de récupérer cette cigarette avant qu’elle ne s’éteigne sur le sol détrempé par une averse récente. Alors elle se penche et la ramasse, tire même une bouffée avant de relever la tête. Et là, elle le voit. Il s’est interposé, il crie après la bande de types, des mots qu’Evey ne comprend pas vraiment. Les lumières dansent au fond de son œil et il lui faut un instant pour réaliser ce qui se passe. Il est venu. Il l’a suivie. C’est ce qu’elle espérait, quelque part. Eh bien, elle devrait être satisfaite, pourtant elle n’arrive pas à appréhender la situation. Elle reste silencieuse, les bras ballants, la cigarette se consume alors que les abrutis se cassent non sans un charmant geste à l’encontre des deux jeunes gens.

Non. Non, c’est des conneries. Elle ne doit pas se laisser attacher comme ça à ce garçon qui ne lui fera que du mal. Avant qu’il n’ait le temps de l’interpeller, elle tourne le dos, fait quelques pas, s’apprête à fuir cette situation qui ne peut que la faire souffrir. Pourtant, quelque chose, au fond d’elle, la retient. Elle essaie de faire taire cette envie, ce besoin de le voir, de le toucher, de lui parler, mais elle n’y arrive pas. Alors, elle fait de nouveau volte face, et revient sur ses pas. Ils sont tous les deux face à face à présent, Evey évite le regard de Fab, par peur, par lâcheté, mais aussi parce qu’elle ne sait pas ce qu’elle pourrait faire si ses yeux croisent ceux du jeune homme. Elle rassemble son courage et redresse la tête, seulement pour voir qu’il évite de la regarder. Elle s’en veut de l’avoir giflé, mais sur le moment, c’est tout ce que son cerveau paniqué a réussi à faire. Qu’est-ce qu’elle peut lui dire ? Nier, mettre sur le compte de l’alcool ? C’est évident que ça ne pourrait jamais marcher entre eux, et pourtant… Pourtant, un coin de son esprit ne peut s’empêcher d’espérer. Et si elle lui disait tout ? Si elle lui avouait ? De toute façon, il ne peut pas être plus absent que ce qu’il est déjà. Elle n’a rien à perdre. Il la supplie de dire quelque chose. Son visage se ferme mais les larmes lui montent aux yeux.

« you don’t fucking get it, do you ? »

Sa voix est teintée de désespoir et elle se remet droit, aspirant furieusement une bouffée de sa cigarette avant de la souffler brusquement. Elle s’approche, lève le bras, sa main libre serrée en un poing, et alors qu’elle s’apprête à faire quelque chose qu’elle regretterait, ses doigts se desserrent un peu, la force quitte son bras, et finalement elle pose mollement son poing au milieu de la poitrine de Fab. Elle mord sa lèvre fort, très fort pour s'empêcher de pleurer, mais c’est trop tard et de grosses larmes roulent déjà sur ses joues.

« tu m’as laissée sans nouvelles… Je me suis tellement inquiétée, you fuckin wanker… I thought you might be dead or something. »

Elle hoquète et les sanglots se font plus nombreux, elle laisse tomber sa cigarette pour envelopper sa bouche avec ses doigts, essayer de retrouver une respiration normale. Elle bascule un peu contre fab mais se redresse, le repousse. Non. Et puis elle réfléchit et si elle lui dit ce qu’elle ressent, il y a des chances qu’elle n’ait plus jamais l’occasion de le serrer dans ses bras. Alors elle se jette contre lui, de toutes ses forces, désespérée. Elle enfouit son visage trempé de larmes dans son t-shirt et remercie mentalement Yulia de lui avoir fait mettre du mascara waterproof. Elle n’entoure pas ses bras autour de lui, pour ne pas le contraindre à rester, mais les replie contre sa propre poitrine qu’elle sent tressauter à chaque respiration, à chaque sanglot. La bouche écrasée contre le tissus des vêtements de Fab, elle le respire, et se blottit, sachant que ça sera peut être la seule fois. Elle aurait tout donné pour sentir sa peau contre la sienne, son souffle contre le sien, ses yeux contre ses yeux. Mais elle n’a plus beaucoup d’espoir à présent.

« please never do something like that again. »

Elle chuchote, sans être sûre qu’il l’entende, plus pour elle même que pour lui. Comme une promesse solennelle que s’il refait quelque chose comme ça, elle le sortira de sa vie. C’est beau d’avoir des principes, mais Evey sait qu’elle n’a aucunement la volonté de les appliquer. En revanche, elle n’a plus rien à perdre, alors elle respire une dernière fois le parfum du jeune homme, comme pour se donner du courage, et s’arrache à lui.  

Sa respiration est encore chaotique, alors elle se force à se calmer. Elle essuie ses larmes du revers de la main. Elle inspire un grand coup.

« Oh god, i’m always fucking crying. I just- It’s just that you’re someone i really care about. You’re talented and you’re smart and you’re just- I’m angry because i thought you ditched me. That night, when you found out… I was happy that you were here, somehow, because i got to spend some time with you… »

Elle s’égare encore, tourne autour du pot, tente d’éviter l’objet de la conversation. Mais elle ne peut pas. Elle doit dire la vérité. Il ne lui sert plus à rien de vivre dans le mensonge. Elle n’a rien à perdre et tout à gagner. N’importe quoi lui irait s’il décidait de rester. Juste tenir sa main, juste respirer le même air que lui. Si elle pouvait encore dormir avec lui, leurs deux formes creusant le lit, front contre front, leurs cheveux se mêlant en un tissu aux motifs incertains. Ses oreilles bourdonnent, elle prend une inspiration profonde, comme avant de plonger dans une eau à la profondeur incertaine. Et puis, en regardant ses pieds, elle se lance.

« I fucking love you, you idiot. »

Voilà. Les mots retenus depuis des années, depuis une éternité, sont tombés. Ils semblent flotter dans l'air. Le temps se ralentit. Quelle que soit la réponse, se dit Evey, c'est le début du reste de sa vie.

love.disaster

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