CALYPSO&GREGORY - At least, I have you...

Plusieurs mois se sont écoulés depuis la fusillade. Les plaies ont été pansées, les souvenirs douloureux chassés et la vie a repris son cours. La réputation de l'hôtel est restée quasiment intacte et les affaires n'ont jamais été aussi florissantes. Andrea et Tristan filent le parfait amour et j'ai fini par me faire à l'idée qu'ils forment un couple marié. Le fait que Laureline fréquente le fils de mon vieil ami Matthew me comble de bonheur et les choses se passent à merveille avec Calypso. Le seul bémol est sans doute cette sombre affaire avec Nicolas - mon autre fils. Son arrivée a complètement chamboulé ma vie et empiré mes relations avec les jumeaux. Et dire que les choses commençaient tout juste à s'arranger avec Tristan... Je ne sais plus quoi faire pour arranger le tir. J'ai beau me dire que j'ai bien agi et que je ne pensais pas à mal; j'ai beau tenter de me convaincre que leur cacher la vérité sur l'identité de Nicolas n'était qu'une manière de les protéger, au final j'en viens toujours à la même conclusion: j'ai été égoïste. Une fois de plus j'ai brillé par ma lâcheté et je suis indéfendable. Je pousse un long soupir et passe mes mains sur mon visage. Ça fait presque dix minutes que je suis posté devant notre suite. Mais je n'ose pas entrer pour autant. Je n'ose pas ouvrir la porte parce que je sais que Calypso m'attend, rayonnante comme à son habitude et je n'ai pas envie de lui gâcher sa bonne humeur. Elle a eu beaucoup de mal à se remettre de l'attaque et je me fais beaucoup de soucis pour elle. Je prends une grande inspiration et me résigne à entrer après avoir chassé les vilaines pensées qui polluaient mon esprit. « Salut toi » je lâche en passant mes bras autour de sa taille. « Tu as passé une bonne journée? » je continue en l'embrassant dans le cou. « Excuse-moi de ne pas avoir répondu à ton sms tout à l'heure, mais j'étais à un déjeuner d'affaire. Ça c'est fait à la dernière minute, je n'ai pas eu le temps de t'en parler, mais tu m'as manqué ».

Je ferme les yeux, laissant l'eau chaude couler le long de mon visage, puis de mes cheveux, tâchant de ne pas penser à la journée harassante que je viens de passer. J'ai l'impression d'avoir un florilège de clients difficiles en ce moment. Depuis que j'ai orchestré le très beau et très médiatique mariage d'Andrea et Tristan, j'ai de plus en plus de demandes et ma clientèle s'est très largement ouverte du côté de la communauté gay et lesbienne. Je ne m'en plains pas, je suis grande partisane de l'égalité des droits. Mais la charge de travail est considérable et mon agenda est plein jusqu'en septembre 2013. Et puis, surtout, il y a le mariage de Mélanie et Nicolas. Je soupire, éteignant finalement le jet d'eau pour me sécher et m'habiller.

Pensivement, je brosse ma chevelure brune et surveille l'heure, guettant l'arrivée de Greg. Cela fait trop longtemps que nous n'avons pas eu une minute à nous. Le travail, sa famille toujours plus grande... Je ne peux pas dire que j'ai été enchantée d'apprendre qu'il y avait encore tout un pan de sa vie dont je ne savais rien, mais Nicolas est un garçon adorable. Et Mélanie... semble bien élevée. J'enfile une simple robe bleue et la porte s'ouvre alors que je sors de la salle de bains. Il m'enlace et je dépose un baiser léger sur ses lèvres. « Longue journée. Et ne t'en fais pas, je suis d'autant plus contente de te voir. » Je passe mes bras autour de son cou et l'embrasse à nouveau, plus longuement, profitant de sa présence qui m'avait manqué. « On prend l'apéritif ici? Il est un peu tôt pour aller dîner... » Je suis une méditerranéenne et je ne pourrais jamais, ô grand jamais, me faire à l'idée qu'un repas du soir puisse se prendre à 18h30. Fort heureusement, ce n'est pas dans les habitudes de Greg. Je souris, ouvre le mini-bar et en sort 1/4 de vin rouge de qualité, que je verse dans deux verres.

Nous nous installons dans le canapé et je me blottis tout naturellement contre lui et souris. Je me sens bien. Et je suis heureuse d'avoir enfin l'occasion de passer une soirée au calme avec Greg pour discuter. « D'ailleurs, j'ai discuté avec Mélanie aujourd'hui. Elle est plutôt exigeante. » Je ris légèrement et un peu jaune. Quelque chose me déplaît foncièrement chez cette jeune femme, mais je ne saurais dire quoi. Et j'espère que Grégory l'aura senti lui aussi, que je ne suis pas juste en train de projeter ma jalousie sur une innocente femme enceinte ou que je ne vire pas parano depuis la prise d'otages...

Lorsque j’ai rencontré Calypso, j’étais loin de me douter que j’allais tomber amoureux. Après tout ce qui s’est passé avec Christine, je ne pensais plus en être capable et puis, l’amour m’est tombé dessus; comme ça, sans crier gare. J’ai peut-être été un peu long à la détente c’est vrai et, j’ai toujours un peu de mal à exprimer mes sentiments, mais ces derniers mois auront au moins eu le mérite de nous rapprocher. Tout est beaucoup plus naturel désormais. « Longue journée. Et ne t'en fais pas, je suis d'autant plus contente de te voir » répond-elle avant de m‘embrasser. Elle me propose ensuite de prendre l’apéritif dans notre suite et nous sert deux verres de vins. « Merci » je murmure alors qu’elle se blottit tout contre moi et commence à se plaindre du comportement de Mélanie. Je souris lorsqu’elle évoque ma future belle-fille. Je n’ai pas pour habitude d’intervenir dans son business, mais je ne peux faire autrement qu’affirmer ses propos. Aussi sympathique soit-elle, mademoiselle Delacre a son petit caractère. « Elle est peut-être un peu exigeante, mais tu en as vu d’autres! Prenez le temps de discuter, remets là gentiment à sa place si besoin est, mais ne te braques pas s’il te plaît. Tu sais… les choses sont déjà si compliquées avec Tristan et Laureline, j’aimerai autant limiter les dégâts avec Nicolas. Alors… » Je marque une courte pose et passe ma main dans ses cheveux « Même si elle est insupportable, essayes d’être sympa, organises lui le mariage de ses rêves. Si elle dépasse les bornes, je te promets d’intervenir, mais en attendant, tu veux bien faire un petit effort? » Caly me jette un regard faussement interloqué. De toute évidence, elle a vraiment du mal avec Mélanie. Voilà qui est déroutant. Cette jeune femme est pourtant si gentille... « Fais-le pour moi, je te promets que je te revaudrai ça » je conclus en levant mon verre vers elle.

« Elle est peut-être un peu exigeante, mais tu en as vu d’autres! Prenez le temps de discuter, remets là gentiment à sa place si besoin est, mais ne te braques pas s’il te plaît. Tu sais… les choses sont déjà si compliquées avec Tristan et Laureline, j’aimerai autant limiter les dégâts avec Nicolas. Alors… » Je fronce le nez, un peu froissée qu'il pense tout de suite que je vais me braquer. Je sais que les choses sont compliquées, il n'y a qu'à voir le mélodrame causé par le mariage de Tristan et Andrea, le comportement et la simple présence de Christine. Et puis, il a quand même un fils caché. Mais non, ce n'est pas ce qui me dérange. Ce qui me gêne c'est qu'il pense que je vais mal réagir. Ne pas être professionnelle. Je ne suis pas son ex-femme. Je ne suis pas son ex-maîtresse. « Même si elle est insupportable, essayes d’être sympa, organises lui le mariage de ses rêves. Si elle dépasse les bornes, je te promets d’intervenir, mais en attendant, tu veux bien faire un petit effort? » Je lui lance un regard, me demandant s'il pense vraiment que je ne ferais pas d'effort. Que je ferais mal mon travail. Mon travail. La chose la plus importante, à part lui, le moteur d'une immense partie de ma vie. « Fais-le pour moi, je te promets que je te revaudrai ça » Il lève son verre et je lui rends la pareille, un mince sourire aux lèvres.

« Je n'ai jamais dit qu'elle était insupportable. Et je ferais bien sûr tout ce qui est en mon pouvoir pour que ce mariage soit parfait. Comme toujours. C'est mon métier. Depuis des années, Grégory. Et je n'ai jamais mal fait mon métier. » J'avale de longues gorgées de vin, m'en voulant un peu d'avoir été aussi froide. « Désolée, je ne voulais pas être aussi sèche. » Finalement, j'esquisse un sourire et l'embrasse légèrement, avant d'ajouter « Mais ne parlons pas du travail et de tout ça. Je veux profiter d'être avec toi. » Je me blottis un peu plus contre lui, inspirant l'odeur de son after shave, celui que je lui ai offert à Noël. Je souris de nouveau, dépose un nouveau baiser dans son cou et pousse un soupir de soulagement, de fatigue. Je suis foncièrement heureuse d'être ici, tranquillement, en tête à tête avec Greg et je ne veux pas tout gâcher.