i knew you were trouble when you walked in w/ elias

Je zappe depuis cinq bonnes min à la recherche de quelque chose de potable à regarder. Mais j’ai l’impression que ce n’est pas le bon jour. Je finis par mettre une chaîne musicale et baisse le son pour éviter d’entendre une chanson que je déteste. Je soupire et attrape mon téléphone pur envoyer une série de textos. Le premier est pour Gemma pour avoir ses horaires de travail et nous prévoir une soirée tranquille à la maison. Un bon film ou une saison complète d’une série quelconque avec de la téquila et de la glace, c’est ce que j’appelle une bonne soirée. Le deuxième est pour Flore pour avoir des nouvelles et aussi prévoir une escapade jusqu’à Cambridge, terre de nos ennemis mais Flore en vaut vraiment le coup. Le troisième sera pour Candice, my ginger queen. Ça fait une éternité que je ne suis pas sortie avec elle. J’ai l’impression qu’on habite dans deux pays différents alors que finalement, elle passe juste beaucoup de temps à Londres avec Thomas et Cassandra. Je lève les yeux en pensant à elle. Cette petite peste en profite régulièrement pour me descendre auprès de mes amis, ce qui a le don de m’agacer. Enfin, heureusement que Candice me connait bien et que Thomas préfère se faire sa propre opinion sur les gens plutôt que d’écouter sa sœur un peu trop collante. Je soupire une nouvelle fois et espère avoir une réponse positive sinon je serai obligée de camper devant son appartement et je ne suis pas sûre que ses colocs soient d’accord avec cette idée, ni moi d’ailleurs, je ne suis pas une grande fan du camping. Je préfère dormir dans un lit confortable que de passer la nuit dans une tente. Je frissonne en m’imaginant au milieu de la forêt avec ma tente et mon sac de couchage. Je ne ferai pas long feu. Je repose mon téléphone et réfléchis trente secondes. Il y a toujours quelqu’un au Carling et je n’aurai pas besoin d’attendre une réponse de Gemma parce que je pourrai la voir là-bas directement.

J’éteins la télé et prends une douche rapide. J’enfile une robe et une paire d’escarpins avant de repasser à la salle de bain pour l’étape maquillage. J’attache mes cheveux en une queue de cheval puis range mon téléphone et autre choses utiles pour une fille dans une pochette qui a déjà vécu bien des choses au Carling. J’enfile un manteau et arrive à trouver un taxi rapidement. Je donne l’adresse du Carling au chauffeur avec un sourire. J’espère juste que je ne me retrouverai pas toute seule. Sinon je pourrai toujours squatter chez Rose si j’apporte de quoi boire. Je paie la course et entre dans le club. Mais je suis vite déçue en n’apercevant personne que je connais ou presque. Je grimace en me demandant ce que je dois faire ou ne pas faire justement. Il semble occupé et en bonne compagnie. Brune, assez jolie et bien trop proche de lui. Uh oh, ne commence pas. Je détourne le regard et m’installe au bar. Je peux très bien l’ignorer, lui et sa copine. Après tout, j’ai bien réussi à l’éviter quand je le devais. Sauf quand Gemma s’amuse à l’inviter à la maison et à rester. Ça va, je n’ai pas eu à subir une soirée enfermée dans mon appartement avec lui, avec un gâteau au gingembre, comme Rose et Jason. Je souris en repensant aux nombreux commentaires facebook sur cette soirée épique. Un barman apparait devant moi. « Un mojito s’il-vous-plait » A la santé de cette chère Rose ! Et je ne peux m’empêcher de tourner la tête pour surveiller Elias et sa copine. God, il a fallu que ça soit lui que je vois ce soir.

Cela faisait quelques temps qu'il n'avait pas pris le temps de sortir, trop occupé avec ses cours et ses activités liées à l'université. Il n'avait plus beaucoup de temps pour lui. Quand il rentrait, tout ce qu'il aspirait à faire, c'était aller se vautrer dans son lit et ne plus en bouger. Mais ce soir, il s'était laissé tenter par une soirée au Carling. C'était une dénommée Molly qui l'accompagnait pour l'occasion. Elle n'était à Oxford que depuis quelques temps et n'était pas ici pour ses études, qu'elle avait abandonné depuis un moment. Elle s'était trouvé un job dans un des nombreux cafés de la ville, plus précisément l'un de ceux qu'Elias avait l'habitude d'aller. Une nouvelle serveuse était une chose rare là-bas, alors sa curiosité avait pris le dessus et avait engagé la conversation. Puisque lui-même avait été dans son cas, à savoir de ne connaître personne ici à son arrivée, il avait décidé de jouer les bons samaritains en l'emmenant dans ce club, pour qu'elle puisse peut-être faire la connaissance d'autres personnes. C'était toujours plus facile quand ils étaient un peu éméchés, en plus. L'endroit s'était bien rempli depuis qu'ils s'étaient installés à une petite table. Ils discutaient d'un peu de tout, de leur passé plus particulièrement. Molly était de bonne compagnie, et quand bien même elle avait un certain charme, il n'était pas du tout dans l'optique de la séduire. Leurs verres étaient vides et Elias se proposa d'aller en rechercher un. Il allait arrêter là pour l'alcool ce soir et se contenterait d'un soda pour maintenant. Se dirigeant vers le bar, il attendit que le barman vienne vers lui, tandis qu'il était occupé avec une cliente qui semblait tenter un flirt. En attendant, il balaya l'endroit de son regard bleuté pour voir si quelques têtes connues n'étaient pas dans le coin. Un peu plus loin au bar, il aperçut Bonnie. Sans vraiment réfléchir, il se contenta d'aller la rejoindre, ne pensant pas faire quelque chose de mal. Il pensait déjà la présenter à sa fameuse et récente rencontre. Il n'avait pas vraiment penser qu'elle pourrait refuser. Elias avait un peu du mal à réaliser que son ancienne amie ne soit pas aussi amicale qu'elle ait pu l'être et préférait se dire qu'il y avait toujours une bonne excuse à cette attitude. Même s'ils ne s'étaient plus parlés pendant plusieurs années, il avait toujours une certaine tendresse pour elle. Et puis, il n'avait pas le souvenir d'avoir fait quelque chose de mal. Une fois à son niveau, il posa l'un de ses coudes sur le bar sur lequel il s'appuya et se mit de côté, pour pouvoir l'observer. Il la salua simplement, avec un petit sourire. « Salut Bonnie ! Tu tombes bien. » Il fut coupé un instant par Denys, qui vint lui demander ce qu'il voulait. Après avoir commander, il reposa son attention sur elle. « Tu attends quelqu'un ? »

L’avantage de fréquenter assez souvent le Carling, c’est que je commence à connaitre les personnes qui viennent autant que moi, voire plus. Je regarde autour de moi et regrette l’absence de certains habitués. Où est passé Lucy, qui devrait être en train de squatter le micro et nous chanter une chanson française ? Je soupire. De toute façon, je n’allais pas rester devant ma télé toute la soirée. Il fallait que je sorte. Je jette un nouveau coup d’œil à Elias et sa copine et secoue la tête. L’autre avantage de venir ici souvent est de connaitre personnellement les personnes qui y travaillent, comme Gemma ou Denys à l’époque où il travaillait encore là. Je ne dis pas que j’ai accès à des boissons gratuites mais ça laisse la place à quelques habitudes. Enfin, je ne suis pas encore un pilier de bar, qui se fait servir directement sans passer de commande. Heureusement, quand j’y repense. Je n’ai pas envie de m’inscrire aux alcooliques anonymes à mon âge. Peut-être quand j’aurai dix ou vingt ans de plus, épuisée par mes reportages, par les histoires qui m’auront marquées. Quoi que le mieux serait que je n’y aille jamais. Je souris quand mon mojito arrive. Cheers everyone ! Je sors un billet pour payer ma boisson et regrette de ne pas avoir Denys en face de moi. Au moins, j’aurai pu oublier la présence d’Elias, passer une bonne soirée plutôt que de me prendre la tête avec cette histoire. D’ailleurs, je croise les doigts pour que Gemma ne nous voit pas tous les deux ici. Si ça arrive, je n’ai pas fini de l’entendre. Elle a la fâcheuse habitude de m’embêter avec ça, d’en profiter. Et Dieu sait que je déteste ça surtout quand je commence à me rendre compte qu’elle n’a pas tout à fait tort. Mais ce n’est pas le moment de penser à ça. Enfin, c’est dur d’éviter de penser à ce genre de choses quand il apparait à côté de moi. Je me mords la lèvre et m’empêche de grimacer. Un sourire apparait sur mon visage. « Salut Bonnie ! Tu tombes bien. » Je fronce les sourcils un instant. Je tombe bien ? C’est-à-dire ? « Tu attends quelqu'un ? » J’éclate de rire et secoue la tête. « Je n’attends personne. Enfin, je pensais voir Gemma mais ce n’est pas plus mal qu’elle ne soit pas encore là. » Je ricane avant de me retourner vers la fille qui l’accompagne. Je l’observe un instant, me demandant comment ils se sont rencontrés. « Je passe donc la soirée seule, ce qui n’a pas l’air d’être ton cas. » Je me tourne de nouveau vers lui avec un sourire. « Elle est très jolie. C’est qui ? » La curiosité me perdra un jour, pourtant, j’ai ce besoin de savoir ce qui elle est et ce qu’elle fait avec lui.

« Je n’attends personne. Enfin, je pensais voir Gemma mais ce n’est pas plus mal qu’elle ne soit pas encore là. » « Oh, d'accord. » dit-il, avec une légère pointe de sa déception dans la voix. Elle avait donc malgré tout prévu quelque chose pour la soirée. Et bien, tant pis dans ce cas. Ce n'était pas encore ce soir que les choses s'arrangeraient entre eux. Même si elle ne le montrait pas réellement, il avait bien compris que ce n'était plus l'amour fou entre eux, ni même très amical. A l'époque elle aurait sauté sur l'occasion de passer la soirée avec lui. Il avait l'impression d'avoir à faire à une autre Bonnie, totalement différente de celle qu'il avait pu connaître, apprécier, et même aimer. Il s'était raccrochée à une image d'elle qui n'était plus d'actualité. Il se pinça légèrement les lèvres alors que le barman débarque pour prendre sa commande. Il détourne le regard quelques instants le temps de répondre, puis s'intéressa à nouveau à elle, alors qu'elle reprend la parole. « Je passe donc la soirée seule, ce qui n’a pas l’air d’être ton cas. Elle est très jolie. C’est qui ? » « Molly. Elle est à Oxford depuis peu. Ca te tente de nous rejoindre ? Elle a peu de connaissances ici, ça pourrait être sympa de vous présenter l'une à l'autre. Et puis comme on dit, plus on est de fous plus on rit, hein ? » Il n'a même pas relevé la réflexion quant au physique de la jeune femme. Non pas parce qu'il a compris son petit jeu, au contraire, il était sans doute trop naïf. Elle avait sans doute voulu être gentille. En effet, à moins d'être devenue une garce sans nom, Bonnie avait toujours été quelqu'un de bien. Denis débarque pour rapporter les deux verres. Il jeta un oeil à son invitée qui semble un peu perdue, jetant des regards tout autour d'elle. Cette situation, il l'avait connu. Maintenant, Oxford était comme son second foyer, car même s'il avait rêvé de venir ici, il avait laissé derrière lui sa famille en Norvège. Il avait pensé qu'ils ne lui manqueraient pas mais au bout d'un certain temps il s'était pris à regretter leur présence, surtout celle de sa petite soeur. Il prit une gorgée dans son nouveau verre. Il ne put s'empêcher d'avoir une certaine nostalgie de leurs soirées qui avaient parfois fini dans ses draps, en évitant de se faire surprendre par ses parents, qui l'aurait sans doute mis dehors à la seconde qui suit. Elle accepte et Elias la gratifia d'un sourire. Il se dirigea vers la petite table et s'installa à nouveau sur son siège. « Molly, je te présente Bonnie. C'est elle qui m'a accueilli la première fois à Oxford ! Bonnie, voici Molly. »

Si ça avait été quelqu’un d’autre, je ne sais pas si j’aurai posé autant de questions, si j’aurai autant insisté pour en savoir plus sur la fille qui l’accompagne après tout, il fait ce qu’il veut, on n’est pas un couple, bien que Gemma essaie parfois de me faire comprendre que ça ne le dérangerait pas. Vague illusion des années précédentes et de ce fameux été où nous avons vécu quelque chose pendant deux mois. Ce n’était pas la bonne période pour moi et depuis ça ne l’a pas été. Je ne vais pas m’en plaindre mais j’avoue que je me serai bien passé du retour d’Elias dans ma vie. Quoi que le croiser de temps en temps ne me fait rien de mal, je pourrai presque dire que c’est normal. Après tout on a quelques cours et activités en commun. Mais le voir avec d’autres et entendre sans cesse ma meilleure amie me poser des questions – ou faire des sous-entendus – sur lui ou sur ce qu’il s’est passé à l’époque n’arrange pas les choses. C’est dans ces moments-là que je me dis que c’est bête de se prendre la tête pour ça, de vivre dans le passé et qu’il serait dommage de ne pas en profiter. Mais la perspective de revivre une vieille histoire, incluant douleur, déception et mauvais souvenirs me coupe toute envie de reprendre là où on s’est arrêté. Je n’ai rien contre lui dans cette histoire au final. Mais je me découvre un côté rancunier, une mémorisation de souvenirs précis que je n’aurai pas imaginé avoir. « Molly. Elle est à Oxford depuis peu. Ça te tente de nous rejoindre ? Elle a peu de connaissances ici, ça pourrait être sympa de vous présenter l'une à l'autre. Et puis comme on dit, plus on est de fous plus on rit, hein ? » Je grince des dents et manque de lâcher un grognement. Oui bien sur, ça serait très sympa même de faire connaissance avec ta nouvelle copine. Je fronce les sourcils et m’empêche de ricaner face à sa proposition de faire amie-amie avec elle. Mais contre toute attente j’accepte quand même sa proposition. Autant profiter de cet instant pour la connaitre. Je n’ai pas vraiment envie de faire ça un autre jour, à la fac ou en présence de mes amis. « Allons-y ! J’ai hâte de faire sa connaissance. J’aime bien discuter avec les nouveaux arrivants à Oxford. » On se sourit mutuellement. J’attrape mon verre et descends de mon tabouret pour le suivre jusqu’à leur table. Il s’installe sur son siège tandis que je prends place en face d’eux. . « Molly, je te présente Bonnie. C'est elle qui m'a accueilli la première fois à Oxford ! Bonnie, voici Molly. » Je ris un peu. « Oxford, Edimbourg, on a vécu plein de choses finalement. » Je lui offre un beau sourire hypocrite. « Alors Elias m’a dit que tu venais d’arriver à Oxford ? Tu faisais quoi avant ? »