Nathaniel & Margaret ❝ Everything that's really counts to be popular ❞

Elle grimaça, en regardant son reflet dans le miroir. Elle ne se trouvait pas belle, dans cette robe. Elle était trop moulante, montrait trop ses formes – et pas forcément dans le bon sens du terme. Elle soupira lentement. Elle avait déjà changé deux fois de robes, et le résultat était toujours sans appel : elle n’était pas belle. Malgré son maquillage, malgré sa robe de marque que lui avait achetée sa mère. Mais c’était habituel, chez elle. Elle se demanda si elle s’était déjà trouvée belle, finalement. Et la réponse fut non. Oh, elle n’était pas moche, non plus, mais lorsqu’elle se comparait avec des photos de sa mère au même âge qu’elle … Elle aurait préféré lui ressembler un peu plus. Elle se mordilla la lèvre, puis roula des yeux. Ce n’était de toute façon pas le cas, peu importe ce qu’elle déciderait de porter. Et elle n’allait pas passer sa soirée à changer de tenue dans l’espoir d'en trouver une qui lui conviendrait. Ce n’était pas son style, de toute façon, et si cela n’avait tenu qu’à elle, elle serait probablement allée à cette soirée habillée d’un jean et d’un simple tee-shirt. Mais elle avait envie d’avoir l’air le plus féminine possible, pour bien occulter toute possible rumeur sur l’orientation sexuelle de Nate. Alors la robe et le maquillage … Elle s’y obligeait, à contre cœur.

Une fois « prête », elle descendit les escaliers, le pas lourd. Elle n’avait plus envie d’y aller – non pas qu’elle en ait ressenti le désir à un moment donné. L’idée de devoir passer sa soirée à embrasser Nate lui serrait l’estomac. Elle n’allait pas y couper. Ils n’allaient pas y couper, tout simplement. Et elle savait que ce serait le même calvaire pour lui, sinon plus, finalement. Après tout, si Maggie ne devait « que » se faire passer pour sa petite amie et donc l’embrasser, lui devait mentir sur bien d’autres choses. Elle soupira une nouvelle fois, mais se força à sourire en voyant ses parents dans la cuisine, en train de diner. Elle alla les embrasser rapidement, leur souhaita une bonne soirée, puis entrait enfin dans sa voiture. Donnant l’adresse à son chauffeur, elle resta ensuite silencieuse, comme à chaque fois. Elle se demandait si elle ne l’ennuyait pas. Peut-être qu’il aurait aimé pouvoir discuter un peu, se changer les idées. Peut-être qu’il n’aimait pas la musique qu’elle lui demandait de lui mettre – classique ou comédie musicale, bien entendu. Peut-être qu’elle était égoïste. Peut-être qu’il avait l’impression qu’elle le prenait de haut et qu’il pensait que c’était la raison pour laquelle il ne lui adressait pas la parole. Mais elle n’eut même pas le temps de se forcer à lui parler, qu’ils étaient déjà arrivés à destination. Elle le remercia poliment en descendant, puis attendit sur le porche, l’arrivée de son « petit-ami ».

Margaret attendait patiemment Nathaniel sur le porche de la magnifique maison de leur hôtesse pour la soirée, protégée de la pluie. Ils s’étaient convenus qu’il valait mieux se retrouver avant d’entrer dans la demeure, cela faisait plus « couple ». Enfin, en tout cas, elle imaginait que cela faisait plus couple. Mais Maggie n’en avait finalement aucune idée. Les relations et elle … Non, elle ne connaissait pas vraiment ce que c’était, et seuls ses parents pouvaient lui servir de modèle, à l’exception des livres qu’elle dévorait, ou des films qu’elle aimait parfois regarder. Mais ses parents étaient le seul couple réel qu’elle connaissait, et lorsqu’ils allaient à une soirée mondaine, ils y allaient ensemble. Mais peut-être était-ce parce qu’ils vivaient ensemble ? Comment est-ce qu’ils étaient lorsqu’ils n’avaient que son âge ? Est-ce qu’ils arrivaient ensemble à une soirée, ou est-ce qu’ils s’y rejoignaient ? Elle fronçait des sourcils, penchait un peu la tête sur le côté, avant de hausser une épaule et de se dire qu’elle leur demanderait. Ce serait plus simple. La voix de Nate la fit sursauter, et elle faillit faire un pas en arrière alors qu’il déposait rapidement ses lèvres sur les siennes. Il faudrait qu’il la prévienne la prochaine fois, avant de faire ça … Enfin non, c’était stupide. Elle était sa petite amie, au moins aux yeux des autres, et un petit ami n’avait pas à demander l’autorisation pour embrasser sa dulcinée. Sauf dans ces vieux films qu’elle connaissait tant. Mais ils n’étaient pas dans un film, ils étaient dans la vie réelle.

« Bonsoir Nate ! » lui répondit-elle dans un petit sourire, avant de hausser une épaule alors qu’il la remerciait. Ce n’était rien. Enfin si, c’était probablement quelque chose, puisqu’elle allait devoir passer une soirée extrêmement gênante. Mais il était son meilleur ami, elle pouvait bien faire ça pour lui, non ? Elle baissa la tête sous son compliment. Enfin, son faux compliment. Il était son petit ami, il était logique qu’il lui dise quelque chose comme ça. Il était donc supposément amoureux d’elle, et si quelqu’un les voyait, il serait surpris si Nate ne lui disait pas quelque chose dans ce genre-là. « Merci, toi aussi. » lui dit-elle, le pensant de son côté – après tout, c’était Nate, il avait beau être comme son frère, ce serait mentir que de dire le contraire. Puis elle fronça des sourcils en le voyant presque trempé. Quelle idiote, il avait probablement dû marcher ! Elle aurait dû aller le chercher, pourquoi est-ce qu’elle n’y avait pas pensé ?! « Je te dépose, après la soirée si tu veux. Comme ça, t’es pas dépendant des horaires de bus ? » lui proposa-t-elle pour se rattraper, dans un murmure – au cas où un invité arriverait et les entendrait. Prenant sa main dans la sienne, elle expira fortement, comme pour se donner du courage, avant d’ouvrir la porte. « Show Time … » murmura-t-elle une nouvelle fois, croisant ses doigts entre les siens.

Maggie ne répondit rien, alors qu’il la remerciait de le raccompagner – le faisant économiser un taxi. Elle se contenta de lui lancer un petit sourire, avant de hausser une épaule. Cela ne lui coutait rien. Enfin, cela lui ferait faire un petit détour, mais ce n’était rien, en comparaison d’imposer à Nate de choisir entre rentrer à pieds ou prendre un taxi. Maggie avait une voiture à sa disposition, après tout, et il était donc normal pour elle de lui en faire profiter. Elle aurait d’ailleurs dû y penser avant, et carrément aller le chercher avant d’aller à la soirée. Cela lui aurait évité de prendre les transports. Elle ne comprenait pas pourquoi il s’excusait, d’ailleurs. Enfin, Maggie savait qu’il aurait aimé se payer un taxi. Elle savait aussi que c’était compliqué pour lui de le faire. Et il n’avait pas à s’en excuser. Il n’était en rien responsable de ce qui lui arrivait, au contraire, elle trouvait qu’il réagissait à toutes ces épreuves avec courage. La mort de son père, d’abord, puis apprendre ensuite que son père avait trompé sa mère avant d’offrir tout son héritage à sa maitresse ? Maggie ne savait pas comment elle réagirait, si son père faisait la même chose. Heureusement pour elle, son père n’était pas comme celui de Nate. Jamais son père n’aurait de maitresse. Jamais il n’humilierait ainsi sa mère et elle. Et puis, Maggie savait que son père l’aimait. Elle savait que, même s’il ne passait pas beaucoup de temps avec elle, il l’aimait. Il le lui avait même dit – et étant donné que père, comme fille, étaient plutôt réservé sur l’étalage de leurs sentiments, Maggie avait chéri cet instant et s’en souvenait encore parfaitement. Donc non, Nate n’avait pas à s’excuser. Il n’avait pas à la remercier. Maggie ne faisait que soutenir son ami, après tout. Rien d’autre. C’était lui qui faisait tout le reste. Ce fut tout de même un peu à contrecœur qu’elle rentra à l’intérieur de la maison. Elle savait qu’elle allait devoir jouer la comédie, jouer à la petite amie, et n’aimait pas ça. Mais bon, ce n’était pas vraiment comme si elle avait le choix, de toute façon. Enfin si … Bien entendu qu’elle avait le choix, Nate ne l’obligeait en rien … Elle salua un des amis de Nate – comment l’avait-il appelé ? Elle ne s’en souvenait déjà plus – avant d’acquiescer timidement de la tête, en souriant.

La soirée fut longue. Très longue. Elle lui sembla sans fin. Peut-être qu’elle aurait dû boire, au lieu de refuser de boire autre chose qu’un soda. Oui, en plus elle s’était dit qu’elle le ferait mais … Elle ne tenait vraiment pas l’alcool, en même temps. Et si elle gaffait ? Et si elle disait une bêtise et l’embarrassait ? Non, clairement, elle ne pouvait pas prendre ce risque. Elle attrapa sa main, avant de le suivre à l’extérieur de la maison. Elle lâcha ensuite un petit rire face au constat qu’il faisait : en effet, la soirée n’avait pas été bonne, c’était certain. « Vraiment … Tu n’as pas à me remercier, tu sais ? » dit-elle en remettant une mèche de cheveux derrière son oreille. « Enfin … Si tu penses que ça t’aide, alors je le fais avec plaisir. » reprit-elle, avant de hausser une épaule. « Et je suis désolée … Pour tout à l’heure. J’espère que je ne t’ai pas fait mal. » s’excusa-t-elle, en faisant référence à ce qu’il s’était passé quelques heures plutôt, lorsqu’elle avait malencontreusement cogné sa tête contre son nez. Encore une fois, elle avait juste été surprise qu’il l’embrasse – non, il ne pouvait pas la prévenir avant, elle le savait, mais tout de même, ce serait bien plus simple – et avait fait un mouvement probablement un peu trop vif, sur le coup.

Depuis que Nate et elle étaient en couple, Maggie avait l’impression de tout faire de travers, et d’être plus un embarras permanent qu’une réelle aide. Entre le fait qu’elle n’était pas la fille la plus sociale qui existait, qu’elle était incapable de boire une goutte d’alcool sans commencer à se sentir mal – et à faire n’importe quoi, comme elle s’en était rendu compte, une fois – et qu’elle n’était pas vraiment féminine … Elle avait l’impression de ne rien faire comme il le fallait. Pour tout dire, elle ne savait pas ce que c’était que d’être une petite-amie. Elle n’avait jamais été dans une relation auparavant, et finalement, peut-être qu’il valait mieux qu’elle n’en soit jamais dans une. Déjà avec Nate, pour qui elle ne ressentait que de l’amitié, elle était toujours terrifiée à l’idée de commettre un impair, de mal faire quelque chose. Elle était tout le temps gênée, angoissée, mal à l’aise. Est-ce qu’il en serait de même le jour où elle serait réellement en couple ? Ou était-ce parce qu’elle avait plus l’impression que Nate était son frère qu’autre chose, qu’elle cumulait les gaffes dès qu’ils devaient se montrer proches ? Comme un bon quart d’heure plus tôt, lorsqu’il avait tenté de l’embrasser, juste comme ça – parce qu’après tout, ils étaient à cette soirée ensemble pour montrer à leurs camarades qu’ils étaient en couple – et que, sous la surprise, elle s’était vivement décalée, lui cognant le nez de son front.

Et d’ailleurs, peut-être que Nate réalisait à présent la belle erreur que cela avait été, puisqu’il lui disait qu’ils pouvaient arrêter. Elle sentit les larmes lui monter aux yeux, et baissa la tête, préférant regarder ses mains que son ami. « Je suis désolée … » commença-t-elle, un peu honteuse. « Je voudrais faire mieux et t’aider … Mais je fais n’importe quoi. Je fais tout de travers et au final … Je t’embarrasse plus qu’autre chose.» Elle ignora totalement le sujet de la fin du lycée, ce n’était pas le moment d’angoisser sur ce qu’elle pourrait bien faire l’année prochaine. « Et je ne suis pas mal à l’aise … Enfin si … Mais seulement …» Elle laissa sa phrase en suspens, se contenant de lâcher un petit soupir. « Tu crois qu’il y a quelqu’un dans la pièce qui a cru qu’on était ensemble ? » demanda-t-elle doucement, se mordillant la lèvre de gêne, doutant que quelqu’un ait pu penser que Nate voudrait vraiment d’elle comme petite amie, s’il avait été intéressé par les filles.