a night to remember | Nicolas & Vera

Lorsque Bart avait proposé à Nicolas de venir à la soirée du casino, il avait longuement hésité. Il avait fait plusieurs dérapages, ces derniers jours et il ne voulait pas retourner à la vie de débauche qu’il avait pu avoir ces dernières années. Et durant huit mois, il était parvenu à retrouver une vie saine, profitant et savourant les quelques écarts qu’il s’accordait. Puis il y avait eu Vera. Il l’avait simplement croisée et avait décidé de s’offrir ses services, simplement parce qu’il en avait eu envie. Un petit écart, rien de plus, comme d’habitude. Et elle ne serait restée que ça, d’ailleurs, un écart qu’il se serait plu à voir régulièrement, lorsqu’il en ressentait le besoin. Nicolas ne pouvait qu’avouer qu’elle était tout à fait à son goût. Oh, il y avait, de toute façon, bien peu de femmes qui ne l’étaient pas, il fallait bien l’avouer. Mais Vera était d’une beauté rare, dont il avait particulièrement apprécié caresser les courbes avantageuses. Et il l’aurait apprécié à plusieurs autres reprises, sans aucun doute. Puis il avait appris qui elle était, et surtout ce qu’elle représentait pour Bart. Il ne pouvait imaginer ce qu’il lui dirait s’il apprenait qu’il avait payé celle qu’il considérait presque comme sa fille. Il le prendrait comme une trahison, c’était certain, et Nicolas ne pouvait donc prendre le risque de réitérer l’expérience – toute divine soit-elle. Sans même avoir besoin d’en discuter, ils s’étaient donc tacitement mis d’accord pour ne jamais en parler – et ne jamais le refaire, bien entendu. Mais voilà, Nicolas n’était pas vraiment habitué à ne pas avoir ce dont il avait envie. Généralement, il n’avait d’ailleurs qu’à claquer des doigts – ou presque – pour que ses désirs ne deviennent réalité. Autant dire qu’il commençait à rentrer dans ce cercle vicieux et sans fin, et la jeune femme l’obsédait bien plus qu’il ne l’avouerait.

Pour cette raison, il s’efforça à ne pas la regarder, alors qu’elle était déjà en train de roucouler auprès d’un de ses clients. Il serra la mâchoire, avant de commander un verre de whisky au bar, et d’en humer le parfum. Voilà, il valait mieux qu’il se concentre là-dessus, plutôt que sur elle qui … embrassait l’homme ? Réellement ? Il se pinça l’arrête du nez, avant d’expirer lentement pour calmer ces pulsions qu’il ne connaissait pas vraiment. C’était comme s’il n’acceptait pas que quelqu’un puisse l’avoir, si lui ne le pouvait pas. Clairement, cette histoire devenait malsaine et Nicolas n’aimait naturellement pas ça. Peut-être qu’il devrait juste succomber. Refaire appel à elle, simplement pour une heure. Peut-être que le problème était simplement qu’il avait cru que ce serait quelque chose de plus régulier, alors il n’en avait pas assez profité, pas comme il l’aurait dû. Il n’en savait rien. Mais il fallait que cette histoire s’arrête, une bonne fois pour toute. Ou bientôt, il se retrouverait avec un nouveau cancer – du foie, peut-être, vu tout l’alcool qu’il ingurgitait dernièrement – ou du poumon – les rares cigarettes qu’il s’autorisait se transformant à présent en plus d’un paquet. Nicolas était frustré. Et vraiment, il abhorrait cette sensation qui le prenait aux tripes. Mais comme si elle souhaitait venir parader devant lui, remuer le couteau dans la plaie, l’avocat la vit s’approcher de lui, avant de s’installer à ses côtés. « Non, j’ai simplement été invité. Je ne suis pas en service, ce soir, love. » lui répondit-il en lui lançant un sourire en coin, avant de porter son verre en bouche et d’en apprécier le liquide ambré. « Mon dossier est terminé. Et étant donné que tu n’as pas eu de notification de procès … Tu te doutes que le plan A a fonctionné. » Lui n’en avait de toute façon pas réellement douté. Une simple menace avait suffit à faire promettre à l’homme de ne pas porter plainte – et de ne plus jamais s’approcher d’elle. « Tu passes une bonne soirée ? » lui demanda-t-il, presque rhétoriquement, avant de laisser son regard dévier vers son décolleté bien trop plongeant pour ses nerfs.

Nicolas ne s’était pas vraiment attendu à ce que Vera ne le remercie. C’était pourtant la chose à faire, il fallait bien l’avouer. Il avait évité qu’elle ne se retrouve en procès, lui évitant par la même occasion les nombreux problèmes qui se seraient répercutés dans sa vie personnelle. Mais vu la façon dont elle ne démordait pas, la dernière fois qu’ils s’étaient vu, et sa vivacité à la faire comprendre qu’elle n’avait pas besoin de lui et qu’elle se débrouillerait toute seule – apparemment, c’était ainsi que fonctionnaient les gens, « chez elle » – il ne s’était pas attendu à des remerciements. Alors pour seule réponse, il se contenta de hocher vaguement de la tête, et de laisser ses yeux apprécier un peu plus longtemps le magnifique décolleté qu’elle leur offrait. Et voilà qu’il allait maintenant falloir passer aux banalités, sans aucun doute. Lui demander si elle passait une bonne soirée serait probablement un bon début. Même s’il n’en doutait pas une seule seconde. Il n’y avait qu’à voir comment elle était à deux doigts de roucouler avec un de ses clients pour réaliser que sa soirée se passait à la perfection. Amer, il força un sourire alors qu’elle le lui confirmait. « Un client qui en plus d’être régulier est tout à fait charmant. » Elle le faisait exprès. Nicolas en était certain. Elle s’était donnée pour mission de jouer avec ses nerfs, de voir à quel moment il craquerait et enverrait balader sa loyauté au loin.

Mais il était hors de question qu’il ne craque. Elle n’était qu’une femme parmi tant d’autres, et il n’était que frustré de ne pas avoir su qu’il ne pourrait l’avoir qu’une seule et unique fois. Voilà tout. Il lâcha un petit rire, comme elle disait qu’il avait l’air de s’ennuyer. Ce n’était pas tout à fait vrai. Disons simplement qu’il aurait aimé faire des choses bien plus intéressantes que boire un verre au bar. Et peut-être qu’il finirait par le faire, d’ailleurs. Il commençait réellement à en sentir le besoin. Peut-être était-ce ces jambes qui n’en finissaient pas, et qu’elle aimait à lui montrer – parce que Nicolas était tout sauf idiot, encore moins lorsqu’il s’agissait de flirt – ou simplement parce qu’il avait tendance à penser un peu trop à elle ces derniers temps, et à ce qu’il lui ferait si elle n’avait pas été la protégée de Bart. Peu importe la raison, après tout. « Je suis supposé être à la diet. » l’informa-t-elle dans un petit sourire en coin, son verre toujours en main montrant parfaitement qu’il ne parlait pas de cette diet-là – bien qu’il aurait dû s’en passer, aussi, cela ne lui aurait pas fait de mal. « Donc oui … Je m’ennuie un peu. » reprit-il dans une petite moue, avant de jeter un regard sur l’assemblée – et surtout sur les femmes qui la composaient. « Même si j’imagine que je ne vais pas tenir bien longtemps … Surtout avec le choix qui s’offre à moi. » dit-il avant de sourire à l’une des femmes, lui levant son verre par la même occasion. Puis il reporta son attention sur Vera, amenant son verre en bouche pour en boire une gorgée.

Nicolas n’avait pas l’habitude de ne pas obtenir ce qu’il voulait. C’était le moins que l’on puisse dire, d’ailleurs. Depuis qu’il était adolescent, la vie avait tendance à réaliser ses moindres désirs. Le jeune homme qu’il était alors faisait parti des premiers de sa classe, et était déjà promis à un brillant avenir – même s’il ne savait pas encore lequel, il savait que celui-ci serait florissant. Concernant les femmes, cela avait toujours été à peu près pareil. Lorsqu’il souhaitait passer du bon temps avec l’une d’elles, rare étaient celles qui lui disaient non. Enfin, demoiselles, à l’époque, plutôt. Quoique … Il y avait bien eu une de ses professeurs, dont il avait été sous le charme. Mais ils avaient tous les deux été raisonnables et avaient ainsi attendu qu’il soit diplômé – il ne faudrait pas que cela soit inscrit dans son dossier scolaire, ou que sa charmante professeur de français ne se fasse renvoyer, car s’il avait dépassé la majorité sexuelle, il n’en restait pas moins qu’il y avait un lien de subordination entre les deux. C’était probablement la seule frustration que l’avocat aie un jour dû subir. Oh, de nombreuses fois, ils avaient failli craquer et aller plus loin que le flirt innocent. Mais finalement, Nicolas en gardait un très bon souvenir. Lorsqu’ils l’avaient enfin fait, c’était comme si cette attente avait accentué le désir qu’ils avaient eu l’un envers l’autre et donc le plaisir qui s’en été suivi.

Mais là, sa frustration ne donnerait lieu à rien d’autre qu’à une frustration plus grande encore. Nicolas ne pouvait pas l’avoir. Il ne pouvait pas la plaquer contre le mur d’une chambre, passer sa main dans l’ouverture de sa robe et caresser avec ardeur sa cuisse. Il ne pouvait pas passer son autre main dans ses cheveux, lui penchant la tête pour venir câliner sa mâchoire de ses lèvres. Non, il ne pouvait que rester là, à ne rien faire d’autre qu’à l’entendre parler de son stupide client. Il serra la mâchoire, ramenant son verre en bouche pour boire une gorgée de son liquide ambré. Elle ne faisait que répondre à son jeu, après tout. Il feinta donc un sourire, s’efforçant de rester bon joueur, malgré tout. « Je ne sais pas encore. » répondit-il en se rapprochant un peu d’elle. « C’est le plus difficile, j’imagine … Choisir … » Il marqua une courte pause, avant de reprendre dans un petit rire. « Si seulement je pouvais toutes les avoir en même temps. » Ce qui ne serait pas bon pour la baisse de régime qu’il s’imposait, soit dit en passant, mais bon, Nicolas n’avait pas spécialement envie de penser à ce genre de détail. Il laissa sa main venir se poser sur son genou – il pouvait se montrer gentleman, après tout – qu’il caressa de son pouce. « A ton avis … Laquelle me conviendra le plus ce soir ? » murmura-t-il, avant de s’humecter les lèvres de sa langue, sans pouvoir s’empêcher de regarder les siennes.

Le fait de ne pas pouvoir avoir Vera, de ne pas pouvoir la déshabiller hâtivement et habilement, et de ne pas pouvoir laisser ses mains caresser son magnifique corps ... Cela frustrait énormément l’avocat, bien plus qu’il ne le dirait. Oh, jamais il ne l’avouerait, bien entendu, son égo était bien trop développé pour ça. Mais il ne doutait pas que la jeune femme savait lire en lui comme un livre ouvert et, pire encore, qu’elle s’en amusait. Mais il y avait une autre chose dont l’avocat ne se doutait pas : elle était comme lui, aussi frustrée que lui, et avait autant envie de lui que lui d’elle. L’heure qu’ils avaient partagée avait été probablement l’une des meilleures qu’il n’avait pu passer pendant longtemps – en même temps, il sortait alors, seulement depuis quelques semaines, de plusieurs mois de chimiothérapie, donc il ne fallait pas non plus lui donner tous les honneurs. Nicolas savait aussi que c’était toute cette frustration qui rendait l’idée de repartager du bon temps avec elle obsédante. C’était là tout un cercle vicieux, dont il n’arrivait pas à se dépêtrer. Il ne put s’empêcher de sourire, amusé, en la voyant remonter sa main sur sa cuisse – oh, soi-disant qu’elle n’avait que bougé un peu son corps, mais Nicolas n’y croyait absolument pas. Elle était douée, à ce petit jeu, il fallait bien l’avouer. Mais Nicolas, aussi, avait quelques arguments de son côté. Ce fut cette fois-ci un petit rire qu’il lâcha, alors qu’il la vit – subtilement, bien entendu – écarter un peu ses cuisses. Oh, ce qu’il ne donnerait pas pour se lever prestement, attraper son bras de sa main et la guider vers … Il n’en savait rien, en fait, mais il était prêt à parier que même les toilettes du casino feraient amplement l’affaire. Oui, la soulever sur le lavabo, poser ses mains sur ses hanches, l’embrasser avidement. Bon sang ce qu’il pouvait en avoir envie, encore plus en cet instant. Pour autant, il laissa simplement ses doigts apprécier sa peau nue, dessinant des cercles de son pouce. Il suivit ses yeux du regard, avant de faire une moue boudeuse à sa description. « Sa poitrine semble jolie … Ses formes aussi, en général. Mais … je n’aime pas spécialement la superficialité chez une femme. » répondit-il en retournant son visage vers elle. Et de détailler ensuite sa poitrine à elle, avant d’en faire une rapide comparaison. Au moins, les siens étaient vrais. Il reporta son attention sur l’assemblée, avant d’en désigner une du menton, tout en laissant sa main s’immiscer un peu haut, à l’orée de son sous-vêtement. « Qu’est-ce que tu penses de celle-ci ? » souffla-t-il, se rapprochant encore un peu plus d’elle, comme un automate. « Tu penses qu’elle fera l’affaire ? » reprit-il dans un murmure, lui lançant un de ses plus beaux sourires.

Ils jouaient avec le feu. Nicolas le savait pertinemment et ne doutait pas qu’il en soit de même pour Vera. N’importe qui pouvait voir qu’ils étaient bien trop proches pour n’avoir qu’une conversation normale – malgré le bruit qu’il pouvait y avoir dans la salle, ce n’était pas une excuse pour être pratiquement collés l’un à l’autre et avoir sa main sous sa robe, traçant quelques arabesques sur sa peau nue. Pire encore, Bart pourrait les voir. Et là, Nicolas n’osait imaginer quelle serait sa réaction. Pour autant, il ne pouvait pas s’en empêcher. Elle était là, à s’amuser avec lui, et il rentrait dans son jeu sans même y repenser à deux fois. Il était comme aimanté par la jeune femme, incapable de détourner son regard plus de quelques secondes – même pour regarder d’autres femmes, pourtant tout aussi ravissantes qu’elle, si l’on était un tant soit peu objectif, chose qu’il n’était pas à l’heure actuelle. Comme un gamin pourri gâté qui n’aurait pas eu le cadeau de Noël souhaité, comme un chien dont le jouet avait roulé sous un meuble, Nicolas ne voulait qu’une chose : elle. Tout ça parce qu’il ne pouvait pas l’avoir. Il le savait, en plus, il était tout sauf idiot après tout – même si ses capacités intellectuelles avaient tendance à fortement chuter lorsqu’il y avait de l’œstrogène à proximité de lui, il fallait bien l’avouer. Il soupira, jetant un dernier regard à la femme en question, avant de hausser une épaule, las. Oui, elle avait raison, il s’ennuierait à coup sûr. Hmm … La rousse était intéressante, oui, en effet. Il pouvait même déjà s’imaginer caressant ses formes généreuses. Mais il ne suffit de ne jeter qu’un nouveau coup d’œil à Vera pour perdre complètement intérêt pour elle. Et lorsqu’elle reprit la parole, son sang ne fit qu’un tour, comme si un courant électrique parcourait son corps tout entier. Je peux confirmer la rumeur, j’ai déjà testé. Il ferma les yeux, et déglutit en ayant soudainement quelques images fortes intéressantes déroulant devant ses paupières. Elle était douée. Très, très douée. Il lâcha un petit rire en rouvrant les yeux, avant de porter son verre en bouche, plus pour se donner une certaine contenance qu’autre chose. Il ouvrit ensuite la bouche, avant de la refermer et de simplement hocher de la tête, incapable de dire quoique ce soit, tant les idées salaces qui traversaient à présent son esprit l’hypnotisaient. « J’imagine que je vais devoir te faire confiance, alors. » finit-il par répondre d’une voix bien trop grave et suave pour être naturelle. Il ne savait même pas pourquoi il disait ça, alors que lui-même avait déjà testé. Stupide. Idiot, qu’il était. Il lui lança son plus beau sourire, avant de retirer prestement sa main de sa cuisse – après lui avoir effleuré son entrejambe d’une caresse non innocente – puis se leva d’un bond. Il la salua d’un signe de la tête, avant de rejoindre la rousse en question, attrapa une coupe de champagne au passage. Pour autant, malgré tout, il ne put s’empêcher de regarder la brune toujours installée au bar, avant de murmurer quelque chose à l’oreille de la jeune femme, en profitant pour poser sa main sur son bras, qu’il caressa brièvement.